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29 février 2012 3 29 /02 /février /2012 19:24

 

Mardi 28 février

 

Je ne pense pas que je reviendrai jamais à Batticaloa. J’ai quitté la ville avec l’image incongrue d’une statue de scout aperçue furtivement du bus. Nous avons longé des lagunes, traversé des plaines, avant de retrouver la jungle et la basse montagne.

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Vu sur un Tuk Tuk avant de prendre mon bus.


Je me suis installé dans une chambre pas trop mal, grande, sans décoration, mais propre et pourvue de l’essentiel. Soit : des draps propres, un ventilateur et une moustiquaire. Polonnaruwa est aujourd’hui une ville quelconque, mais ce fût la cité des rois voici 1 000 ans.

Les vestiges de cette ancienne cité sont très importants. Ils occupent une surface assez impressionnante. La meilleure chose à faire si je voulais avoir tout mon temps pour apprécier le site était de louer un vélo. J’ai pu ainsi me déplacer à l’intérieur de ce quadrilatère de dix kilomètres sur deux en gardant mes forces pour l’essentiel.

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Bouddha sculpté à même le rock

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Fourmillière ?

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Ce jardinier enlève les herbes à la main, une à une !

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Les forçats de la route.

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D'un site à l'autre.

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Je me suis rendu au musée pour me mettre bien en mémoire quelques petites choses pour comprendre ce que j’allais voir. Curieusement, à l’apogée de la dynastie qui régna sur le royaume cinghalais, l’Indouisme et le Bouddhisme étaient intimement mêlés. On trouve sur le site de nombreuses représentations de Bouddha, mais aussi tout un tas de Déesses et Dieux Indoues comme Ganésa, le Dieu Éléphant ou Pawati, représentée entre parenthèse comme une nana super gironde : taille fine et poitrine en obus. Rassurez vous, je vais en rester là avec le culturel. Deux petites choses tout de même. Tout d’abord j’ai remarqué de nombreuses croix gammées sculptées, sauf que les branches partent à gauche alors que celle que nous connaissons partent à droite. Chacun sait que Hitler a piqué sa symbolique à l’Indouisme. Ensuite, j’ai vu une petite statue, datant du douzième siècle, représentant un  personnage se faisant Hara Kiri. Internet me confirme que le  mot est bien d’origine japonaise, mais il est écrit sur un temple Indoue. À creuser.

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Temple où était gardé la dent de Bouddha.

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Ces ouvriers pilent de la brique avec des batons. La poudre sera ensuite mélangée avec le ciment afin de faire les joints des murs réparés. De cette façon, la construction reste ton sur ton.

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Dagoba

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J’ai passé une journée très agréable à butiner d’une ruine à l’autre au milieu de la forêt. Les chemins sont propres et entretenus, ce qui fait qu’il n’y a aucune difficulté à se déplacer en vélo. En dehors des ruines importantes de temples et de Dagoba, il reste tous les soubassements des anciens murs de la ville. Ils occupent des surfaces énormes, ce qui est assez étonnant pour l’époque. Ce qui rend la ballade encore plus sympa, c’est que les singes sont très nombreux. J’adore les singes. Au passage, Manu me fait savoir que les singes à face noires sont des macaques. Reste à découvrir le nom de ceux à face rose.

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Cette dagoba parfaitement conservée est vieille de mille ans. Elle mesure 54 mètres. Les dagobas sont, à l'image de pyramides complètement closes. Sauf que là, il n'y a pas de porte secrête à chercher. Elles renferment toutes une relique et sont restés à ce jour inviolées.

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Le revêtement de cette dagoba est d'origine.

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Pièce sculptée à même la roche.

 

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Ce Bouddha allongé de 14 mètres a été sculpté sur le même rocher.

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Certains petits temples millénaires habritent encore des cultes avec des spectateurs intéressés.

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Je ne ferai pas d’autres commentaires, juste poster quelques images représentatives. Que ceux qui n’aiment pas les pierres passent leur chemin.

Le soir, j’ai revu le couple de surfeur rencontré à Arugam Bay. Le monde est petit. Nous avons pris notre repas ensemble et nous sommes racontés de belles histoires. 

Ah oui, j'oubliai ! Une petite vidéo qui prouve que les singes sont plus prudents pour traverser la route que certains de nos enfants...

 


 

 

Mercredi 29 février

 

 

Carte Sri Lanka 9

 

Chacun le sait, et je l’ai souvent évoqué, je n’aime pas la fréquentation moutonnière des sites touristiques. On nous conseille d’aller voir des  plages incroyables, d’effectuer de soi-disant magnifiques randonnées, d’admirer des points de vue fabuleux, de faire guili guili à des animaux sauvages drogués etc… En général, il suffit d’aller juste à côté pour être tranquille et profiter des mêmes plaisirs. Cependant, lorsque je passe devant un site historique important, il est difficile de ne pas y aller jeter un coup d’œil. Il se trouve que je me trouve actuellement dans une zone importante pour l’histoire du pays et je sacrifie à mon intérêt pour la chose. Sauf que j’essaye tout de même de me faufiler dans des créneaux horaires peu fréquentés.

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J'ai bien regardé, je n'en ai pas vu la queue d'un

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Aujourd’hui, par exemple, il était fortement conseillé de grimper ce piton rocheux tôt le matin ou en fin d’après-midi. Je me suis donc pointé à l’entré à 12h30, sachant que 90% des visiteurs suivent les conseils des guides. Bien vu Jeannot, j’ai eu une paix royale. Vous allez me dire, à cette heure zénithale et par une chaleur d’enfer, faire une grimpette pareille n’est pas raisonnable. Oui, mais il se trouve que j’ai, en ce moment une forme olympique. Mes longues marches quotidiennes et ma gym matinale font leur effet. Je suis mince comme un Sri Lankais affamé et je gambade sur les pentes comme un ouistiti. Il m’a suffi de regarder la gueule écarlate des quelques personnes hors d’haleine que j’ai rencontrées pour me renseigner sur mes capacités actuelles.

Avant toutes choses, sachez que j’ai enfin rencontré mon éléphant dont voici une image rafraîchissante. Parfois, on a presque sous le nez ce qu’on cherche dans la jungle. Cet animal prenait son bain à seulement quelques encablures de Sigiriya, ville étape du jour.

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Sigiriya ne serait qu’un bourg sans importance si l’érosion n’avait dévoilé, au fil des millénaires, un bouchon de volcan éteint depuis la nuit des temps. Puisque ce caillou était là, il fallait bien qu’un jour quelqu’un décide de s’y installer. L’opportunité s’est présentée à un prince, il y a 15 siècles. Ce trouillard, ayant zigouillé son propre père, aurait fait construire cette citadelle pour échapper au foudre de la vengeance. Cette histoire est, aujourd’hui, controversée, mais elle est tellement jolie que ce n’est pas quelques scientifiques aigris qui vont me gâcher le plaisir sous prétexte qu’on ne trouve aucune trace de pilier. Après tout, c’était peut-être un palais à la belle étoile.

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Ce pont de singe n'est plus utilisé. Dommage, ça devait être marrant.


Il n’y a aucun chemin qui mène au sommet de ce promontoire. Un mystère de plus sur l’édification de ces constructions. Du bas au pied du rocher, ce sont des marches anciennes qu’il faut grimper, mais ensuite les escaliers de pierres et de métal ont été installés pour permettre la visite. Vu la hauteur du rocher, grimper au sommet équivaut à se payer la tour Eiffel par les escaliers. On aperçoit par endroits de toutes petites marches creusées dans la pierre sur les parois abruptes, sans doute pour aider les anciens dans leur escalade, mais sans matériel adapté, ça devait être extrêmement casse gueule. Il faudrait que j’aille a la pêche pour des renseignements plus précis lorsque j’aurai un moment.

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Ce n'est pas une piscine, mais un réservoir d'eau.

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Les jardins ont un petit air du Champ de Mars, non ?

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Cette bestiole n'était pas décidée à me laisser passer.

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Le sommet du caillou est totalement construit.

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Le trône fait face à un fabuleux paysage

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Vue partielle de l'escalier final avec deux pattes de lion encadrant le départ.

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Salle de réunion des moines

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Salle du conseil


Au milieu de la falaise, en un endroit inaccessible, se trouve une grotte où ont été retrouvées des peintures pratiquement intactes. On y accède par un escalier en colimaçon accroché à la paroi de façon un peu précaire. Considérant l’état de rouille avancé des grillages et les ouvertures béantes qu’on y voit, ça fout un peu les jetons. D’ailleurs, j’ai vu une nana, complètement tétanisée, s’arrêter au milieu et redescendre.

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L'escalier en colimaçon n'est accroché à la falaise que par ces menues barres de fer.

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Le grillage de sécurité a des manques. Pas rassurant.

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En plus d'être acrobate, le peintre n'était pas mauvais. Ces peintures sont tout de même vieilles de presque 1500 ans.

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Pour terminer, ces deux petites choses amusantes. 

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Après le chien surfeur, le chien touriste. Ce coquin n'a pas payé son billet.

Il est difficile de faire des images assez parlantes pour représenter la majesté du lieu. Vous en aurez tout de même une petite idée avec les vues ci-dessus.

 

 

 

Jeudi 1er Mars

Carte Sri Lanka 10

 

En remplissant le registre de la Guest House, j’ai vu à la ligne au-dessus un nom bien Français. Entre parenthèse, neuf fois sur dix, je remplis le registre moi-même, y compris le numéro de passeport. Cela autorise un criminel à passer inaperçu pour le reste de ses jours. Il suffit d’inscrire un faux nom et un faux numéro. Info gratuite pour ceux qui veulent se cacher.

Le nom en question appartenait à une femme. C’était la  première fois en quatre mois que je tombais sur une Française voyageant seule. J’étais curieux de voir le phénomène.

Dambulla se trouve à un jet de carreau de Sigiriya, cela n’a pas empêché le bus de battre le record de lenteur avec la moyenne pharamineuse de 19 Km/h. Et oui, je chronomètre, cela fait passer le temps.

La particularité de Dambulla est de posséder un temple connu de tous tellement on voit sa photo sur les pubs du Sri Lanka à l’étranger. Je vais passer sur ce temple qui n’a d’intérêt que sa gueule un petit peu comique. En revanche, si on prend la peine de gravir la montagne qui se trouve derrière, on trouve, proche du sommet, cinq grottes décorées de superbes façon. Elles sont objets de culte depuis presque deux mille ans et abritent quelque 150 représentations de Bouddha. La plus grande mesure 52 m sur 23, ce qui n’est pas rien si on considère que les 1200 m2 de plafond sont entièrement couverts d’images de Bouddha.

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Curieux, non ? On voit bien la patte asiatique qui l'a financé.

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Vu dans le musée du Temple d'Or. Remarquez la croix gammé.

Encore une fois, ces quelques photos parleront d’elles-mêmes. Pour atteindre les grottes, il faut encore gravir un certain nombre de marches, une spécialité du coin. Comme je l’ai dit hier, je fais ce genre de visite à la mi-journée. La chaleur ne me dérange pas outre mesure, mais il y a eu aujourd’hui un effet pervers qui mérite d’être conté. Vous le savez, il faut poser ses chaussures avant d’entrer dans un lieu de culte, même s’il est vieux de deux mille ans et s’il s’agit de ruines. Il se trouve, qu’aujourd’hui, la distance entre les chaussures et l’entrée était d’environ 50 mètres. Distance qu’il fallait parcourir pied nus, sur des dalles chauffées au-delà du supportable. À l’aller, la bordure était encore à l’ombre des arbres et j’ai pu faire le trajet sans encombre. Mais au retour, nous nous sommes retrouvés à quatre, planté devant la petite esplanade, sans oser poser le pied sur le sol brûlant. Vous avez déjà vu ces films d’aventures où le héro doit marcher sur des braises pour prouver son courage. Et bien, nous nous trouvions tous les quatre dans la même situation. Après deux ou trois essais infructueux de mes compagnons d’infortunes, j’ai suggéré que le meilleur moyen était de courir. En effet, c’est pendant la course que le pied a les appuis les plus brefs sur le sol. Pour prouver mes dires, j’ai piqué un sprint d’anthologie, sans trop de dommage, certes, mais je sens encore la plante de mes pieds à l’heure où j’écris. Après quoi, j’ai regardé les trois autres faire les gugusses dans une pantomime digne de Charlie Chaplin. Ils n’avaient qu’à m’écouter.

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Bâtiments qui protègent l'entrée des grottes

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Pieds d'un Bouddha allongé, environ 1,50 m

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Plafond

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Détail d'un Bouddha allongé

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Plafond

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Vue des grottes

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Au loin, le rocher de Sigiriya

Ce soir, en sortant pour manger, j’ai vu la jeune femme dont j’ai parlé plus haut, installé dans le salon, en grande discussion avec deux types à la dégaine assez étrange. J’ai salué discrètement et je me suis sauvé. En revenant une heure trente plus tard, elle était toujours dans le salon, mais seule. Je n’avais pas passé la porte qu’elle me faisait un grand signe accueillant : « Hello, vous allez bien ? » Ça ne pourrait aller mieux ai-je pensé en m’affalant dans le fauteuil, en face d’elle. Elle se prénomme Chloé, la trentaine tout juste, grande, blonde et sans chichi. La preuve, elle a proposé de se tutoyer après seulement deux minutes de conversation. Elle a quitté la France depuis un mois, en route pour un voyage d’un an après avoir quitté son travail. C’est son premier grand voyage et j’ai senti d’emblé qu’elle se sentait seule et qu’elle était heureuse de parler. Elle dispose d’un billet Tour Du Monde, ce qui coûte moins cher, mais qui n’est pas à mon avis la meilleure façon de faire. Elle le regrette d’ailleurs, car comment savoir à l’avance si on aura envie de prolonger son séjour dans tel ou tel pays. Son premier stop a été pour l’Inde qu’elle a beaucoup aimée, mais trois semaines pour un si grand pays !

Nous avons causé à bâtons rompus deux heures durant et, au fil de la conversation, j’ai senti qu’elle serait heureuse d’avoir un compagnon de voyage pendant quelque temps. Elle a regretté que nos routes ne soient pas parallèles. Tout en l’écoutant, je la dévisageais et ça turbinait ferme dans mon crâne. Elle était jolie, bien faite, de commerce agréable, et j’avais bien besoin aussi d’un peu de compagnie. Après tout, mon itinéraire n’était pas gravé dans le marbre. J’avais le temps et la situation était le parfait exemple de ce en quoi je croyais : ne jamais laisser passer une opportunité, quel qu'en soit le domaine. Il fallait juste que j’obtienne ce visa et je pouvais ensuite m’adapter à ses impératifs pendants quelques jours. Je lui ai fait part de mes pensées et elle en a eu l’air très contente. « On pourrait partager le prix de la chambre a-t-elle suggéré ». « Bien sûr, ai-je dit », que voulez-vous répondre d’autre ?

Il n’y avait qu’un obstacle à tout ce beau programme, c’est qu’elle n’avait pas de téléphone et devait donc trouver un cybercafé pour me faire savoir par e-mail où elle sera mardi. Pas trop de difficultés à priori.

 

 

 

Dimanche 4 mars

Carte Sri Lanka 11

Trois jours sans importance en stand by à Négombo en attendant lundi pour renouveler mon visa. Je me suis imposé le repos afin de repartir pour le prochain mois frais et dispo. Au programme : chaise longue, cure de fruits et légumes et un peu plus de sommeil qu’à l’accoutumé…

Désolé, j’avais deux ou trois trucs à vous dire sur ce long week-end, mais ce soir, le cœur n’y est pas. Je peux même dire que je suis dévasté. C’est un peu risible étant donné que la raison de mon chagrin pourra paraître à beaucoup dérisoire. Utah est morte subitement ce matin et je ressens cela comme la perte d’un proche. Je n’ai aucune explication cartésienne à donner, sauf que j’aimai ce chien.

 

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21 février 2012 2 21 /02 /février /2012 12:37

 

Lundi 20 février

 

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Déjà deux semaine que je suis là. Deux semaines que je n’ai pas vu passer.

En me rendant à Arugam Bay, je savais trois choses. Nous étions hors saison ; ça avait l’air d’un chouette coin ; j’avais bien besoin de me reposer un peu.

Arugam Bay se trouve sur la côte Est, hors des circuits touristiques classiques, mais c’est aussi le meilleur « spot » de surf de l’île. Il faut disposer de temps pour se rendre là-bas car il n’y a pas de ligne ferroviaire ni d’aéroport. Cela élimine une bonne partie des visiteurs. Reste les surfeurs, mais comme la saison des vagues ne commence qu’en avril, j’avais bon espoir de trouver un peu de tranquillité.

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Une nouvelle fois, 2h30 de bus pour 70 Km. Ce qui somme toute est assez rapide. Quelques vaches sur la route, bien sûr...

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ainsi que des céréales et du maïs mis à sécher.

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Il y avait un militaire en armes dans le bus. Peut-être parceque Pottuvil est une ville Tamoul et qu'au sud de cette zone, il y a encore des troubles sporadiques. Le militaire a demandé un arrêt devant cette cabane, puis il est descendu déposer près du viel homme, le petit paquet blanc que l'on devine sur la photo.Je me demande bien ce qu'il pouvait contenir.


Ma première impression est favorable. La baie est magnifique, la plage déserte, l’eau est un vrai bouillon et je loge dans une hutte en bord de plage. Je me suis laissé dire qu’il y avait des hardes d’éléphants sauvages juste après la pointe sud de la baie. Je préfère cela  à la visite d’un parc hors de prix et accompagné. Il faut rester évidemment très prudent car il y a, en moyenne, 70 morts par an du fait de la charge de pachydermes belliqueux. Les paysans sont obligés de monter la garde jours et nuits pendant trois mois pour les chasser, sinon les éléphants bouffent les récoltes. Certaines fois, des cabanes de terre sont écrasées, par le passage d’une harde, avec tout ce qu’il y a à l’intérieur. Cela fout un peu les jetons mais bon…

La Guest House où je loge ressemble plutôt à un campement de brousse Africain. Les huttes sont construites pour l’essentiel en bois et feuilles de palmes. Certaines sont dans les arbres et s’intègrent parfaitement au paysage. Concernant la faune présente ici, c’est bien ce à quoi je m’attendais : un mélange de vieux babas, de jeunes Australiens blonds et de nanas assez canons. Cependant, on ne se marche pas sur les pieds.

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J'attends que ma hutte soit nettoyée avant d'emménager. On peut voir derrière mon sac 3 babas assez cools. 

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La table d'hôte du camp.

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Dans un coins, ces sentences définitives que l'on pourrait traduire par :

 Les sources élémentaires du bonheur sont un grand coeur, l'amour et la compassion.

Faites ce en quoi vous croyez, même si vous devez le faire tout seul.

Merci, Mr Lama, mais j'avais un peu deviné.


Ce soir, à table, j’ai fait la connaissance d’un jeune couple de surfeurs. Elle est Australienne, et lui Anglais. Ils sont ici depuis quelques jours et m’ont déjà donné des infos qui m’éviteront des pertes de temps inutiles.

La route qui suit la baie est bordée de cabanes, de restaurants locaux minuscules et de nombreux logements chez l’habitant en vue de recevoir les surfeurs en saison. Tout au bout de la baie, à l’endroit où elle s’incurve, se trouve un village de pêcheurs avec, sur le sable, une flottille d’embarcations.

En fin d’après-midi, j’ai fait une balade sur la plage les pieds dans l’eau. Un pauvre dauphin venait de s’échouer. Je pense qu’il était mort. De toute façon, je ne me voyais pas le ramener dans l’eau tout seul.

Au moment où j’écris, seul le bruit du ressac me parvient. La brise est tombée. Tout est paisible. À mon avis, je suis là pour quelques jours.

 

 

 

Mardi 21 février 

Ils disent qu’il n’y a pas de moustiques. C’est vrai la journée, mais il y en a tout de même quelques-uns la nuit. Toutes les chambres que j’ai occupées jusqu’à présent étaient équipés de moustiquaires, ce qui fait que je n’ai pas eu à utiliser celle que je transporte dans mon sac et qui est encore dans son emballage. Elle pèse 200 gr, poids que je serai content d’avoir trimballé le jour où je tomberai sur une moustiquaire trop déchiré pour que je lui fasse confiance. Ce que je voulais dire avant mon aparté, c’est qu’il y en a toujours un où deux qui arrivent à se faufiler et qui emmerdent le peuple. Je me suis réveillé au milieu de la nuit avec une démangeaison sur la main et dans le creux de l’avant-bras. Des endroits que j’avais dû oublier de tartiner avant de sortir bouffer sous les palmiers. Heureusement, j’ai ma pharmacie, merci David. Un peu d’Hydrocortisone et les démangeaisons ont rapidement disparu. Je me suis rendormi, non sans avoir occis l’impudent. Tout ça pour dire que vous pouvez prendre toutes les précautions du monde : chaussettes et manches longues le soir, anti-moustique, moustiquaire, vêtements imprégnés, vous allez toujours vous faire avoir à un moment ou à un autre. Il ne reste plus à espérer que les quelques-uns qui passent au travers ne sont pas porteurs de la Dengue ou de la Malaria.

Au bord de la mer, en cette saison, nul besoin de climatiseur. Un ventilateur en vitesse lente suffit. Je ne souffre pas de la chaleur. C’est même assez agréable de dormir à poil sur un drap et de se sentir en plein confort.

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La hutte où je loge

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Devant la hutte, une petite terrasse

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J'ai eu la dernière de libre en bord de mer. Celles dans les arbres étaient occupées ou trop grande pour moi. 

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Le camp, vue de la plage. Assez écologique, non ?

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Pointe sud de la baie vue du camp

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Vue de ma hutte

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Le restaurant se trouve à 50 mètres


Lorsque j’ai ouvert la porte de ma hutte, ce matin, et que j’ai vu les écureuils courir partout au moment où le soleil sortait de l’eau, la plage vierge, le calme sidérant qui régnait, j’ai pensé aux gens que j’aimais. C’est vrai que, parfois, ça serait sympa de partager ces moments. Je me suis assis sur ma minuscule terrasse, j’ai regardé le mobilier complètement déglingué, les planches disjointes, les branches tordues qui servent de rambarde, ma douche privée en plein air, et je me suis demandé ce qui me manquait à ce moment présent. La réponse était : rien. Je transportais avec moi tout ce qui m’était utile – c’est fou de penser à toutes les choses dont on peut se passer, si on y réfléchit bien – je pouvais rester, partir quand bon me semblait, je n’étais pressé par rien ni par personne, je disposais du luxe ultime : le temps.

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Chien surfeur

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Prao de pêche

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Dis Jacques, t'as vu le cockpit ?

Après ce moment de béatitude, j’ai eu un petit creux. J’ai pris une douche rapide en regardant un écureuil déconner sur une feuille de palme. Puis je suis allé m’asseoir à la table d’hôte situé à une cinquantaine de mètres de ma hutte. J’ai pris mon petit-déjeuner : une énorme crêpe roulée aux bananes et au citron et un grand café tout en réfléchissant à la suite des évènements. En général je procède par exploration méthodique. Tout d’abord les alentours, puis de plus en plus loin à mesure que j’ai mes repères. J’ai donc décidé d’aller voir le village par la plage et de revenir par l’intérieur. C’est ainsi qu’après avoir pris un bain et m’être amusé dans les vagues, j’ai vu de loin les barques de pêcheurs atterrir –c’est le cas de le dire – sur la plage comme je ne l’avais jamais vu faire. Voici donc quatre petites vidéo pour vous donner une idée sachant que le cirque dure une bonne heure. Pardons pour le son, mais mon appareil photo n’a pas de filtre pour le vent.

 

 

Dernière petite chose. Ces salauds de pêcheurs m’ont embauché pour les aider à remonter le bateau. Je dois avoir une tête sympa.

 

 

 

Mercredi 22 janvier 


Préambule : hier soir, au moment de poster mon Blog, je n’avais plus de connexion. J’ai alors réalisé que ça  faisait déjà une semaine que j’avais ma clé 3G. Décidemment, je ne vois pas le temps passer. Je me suis donc rendu à Pottuvil, ce matin, pour faire recharger ma carte à puce. Malheureusement, nous sommes vendredi, et comme Pottuvil est une ville Tamoul de confession essentiellement  Islamique, beaucoup de magasins étaient fermés dont, évidemment, la boutique Dialog. Pestant un petit peu – je venais de me payer trois bornes à pied – je prenais le chemin d’un petit temple que je voulais visiter, quand j’ai avisé ce type sur le trottoir. Je lui ai expliqué mon cas, lui ai refilé ma carte SIM qu’il a placée dans un de ses nombreux téléphones et, après des manipulations incompréhensibles, il m’a montré un texto sur l’écran qui disait que ma carte était OK. Par sécurité, j’avais pris mon portable et, entouré d’une dizaine de personnes très curieuses, j’ai pu vérifier que la magie s’était opérée. Tout de même, la technique a parfois du bon.

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Ce matin, j’ai changé. J’ai essayé le Peanuts Butter fait maison, étalé sur des toasts épais déjà tartinés de confiture d’ananas. Je sais, ça craint, mais il me fallait du consistant car j’avais prévu une longue journée de marche. Au passage, une anecdote : je me suis levé quinze seconde pour aller chercher une serviette et quand je suis revenu, je n’avais plus que trois toasts au lieu de quatre. La Chinoise - dont je ne vous ai pas encore parlé et qui se nomme joliment Issa Puiman – la chinoise donc, avec qui je déjeunais m’a dit, en rigolant, qu’un corbeau me l’avait piqué. Salauds de corbeaux ! Décidemment, il ne faut rien laisser traîner. Après les singes chapardeurs, les corbeaux voleurs, sans oublier ces effrontés d’écureuils qui entrent dans les huttes pour rapiner.

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J'avais oublié de vous montrer ma petite douche pas très privée.


Je m’étais renseigné sur les éléphants. On avait une chance de les trouver, au Sud, dans une zone appelée bizarrement Crocodile Rock. « Pourquoi Crocodile Rock ? j’ai demandé ». Ben, parce qu’il y a aussi des crocodiles, cette connerie !

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En chemin, j'ai croisé cette famille : papa, maman, tonton, tantine et les 6 marmots.

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Sur la route de Crocodile Rock


Passé la pointe sud de la baie, le rocher en question se trouve à 1h30 de marche. Pour être sur de ne pas me tromper, j’ai suivi la plage. Peut-être pas une excellente idée au départ, vu que marcher sur le sable, ça fatigue le jarret. Mais voilà qu’après 45 minutes, je tombe sur un petit village de pêcheurs dont tous les habitants participaient à une partit de pêche sur la plage. Inutile de dire que j’ai remis les éléphants à demain car je m’en serai voulu de laisser passer ce spectacle.

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La pêche miraculeuse

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Transport du poisson sur des char à boeufs

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Vente du poisson à la criée à même la plage


Je poste quelques petites vidéos un peu plus parlantes que des photos ou de longues descriptions. En plus, j’avoue que j’ai un peu la flemme. J’ai passé la soirée avec un couple de chimistes Allemands et Issa Puiman . Cela m'a fait tirer un peu plus tard que d'habitude. Une fois de temps en temps, ça ne fait pas de mal.

 

 

 

Jeudi 23 février

 

Les Sri Lankais remplacent avantageusement la balayette à chiotte par une douchette à jet puissant. C’est un système beaucoup plus hygiénique. J’ai déjà vu ça en Egypte et j’imagine qu’on doit le retrouver fréquemment en Asie. Si j’avais à construire à nouveau, je ferais installer le truc avec un flexible rétractable dans le mur qui le rendrait discret. Une bonne idée, non ? Allez, ne me remerciez pas !

J’ai marché six heures aujourd’hui. Je suis rentré au camp au crépuscule juste à temps pour m’amuser un peu dans les vagues avant la nuit. Ce fût une journée fort intéressante même si je n’ai pas trouvé ce que je cherchais.

Au départ, j’ai pris une piste qui était censée déboucher au Crocodile Rock, ce qui était le cas, mais j’avais appris en route qu’il existait un petit et un grand Rock. La piste débouchait au petit et c’était au grand que je voulais aller, là où commençait la savane. Pour finir de me contrarier, j’ai été arrêté par un gué, entre la lagune et la mer, trop risqué à traverser tout seul. Le gué n’était pas très large, une dizaine de mètres tout au plus, mais profond et traversé par un courant puissant et rapide. J’ai posé mon sac et mes chaussures à l’abri, puis je suis revenu pour tenter le coup. Si je pouvais traverser, je pouvais revenir, balancer mon sac de l’autre côté et recommencer, mais j’avais à peine fait un mètre que l’eau m’arrivait à la taille et j’ai bien compris que si je perdais pied, j’allais être emporté. Peut-être rien de bien dangereux car les vagues m’auraient probablement ramené au rivage, mais ce n’était pas sûr. J’avais lu que certains forts courants pouvaient emporter les nageurs au large. Parfois, il faut savoir se montrer raisonnable, même si on est frustré. Je me suis donc rhabillé et je suis revenu sur mes pas.

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La lagune

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Petit Crocodile Rock

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Le gué et le grand Crocodile Rock à gauche

 

 

Au bout d’un moment, comme je traversais le village de pêcheurs, j’ai aperçu un attroupement devant un petit terrain en friche. Deux types étaient en train de déterrer un petit palmier sous le regard de quelques flics et des villageois. Je me suis approché d’un groupe et j’ai demandé ce qu’il se passait. Un jeune, qui parlait un peu Anglais, m’a expliqué que le terrain était convoité par deux personne et que le juge, que je voyais là, était en train de trancher le débat. Sur ce, il m’a demandé si je voulais prendre un café dans sa maison. Pourquoi pas, cela me donnait l’occasion de voir une maison de pêcheur. Il m’a présenté sa jeune femme, assez jolie, mais qui ne devait pas avoir plus de 17 ou 18 ans, et sa gamine de quelques mois. Le café était très sucré et avait, curieusement, un goût de menthe. La maison était propre et simple, comme je m’y attendais. Il y avait seulement deux chaises, ce qui fait que la jeune femme s’est assise au sol avec le bébé dans ses bras. Le gars m’a expliqué qu’ils étaient plus de 50 pêcheurs dans le village, autrement dit, tous les hommes valides. Ils n’avaient pas de bateau et ne pouvaient donc pécher que de la plage. Cela voulait dire qu’avec la houle qui déferle ici, ça ne devait pas être tous les jours. Après un moment, j'ai pris congé et, comme je remettais mes chaussures, le gars en a pris une et l’a examiné sous toutes les coutures. Il n’aura probablement jamais ce genre de truc au pied.

En repartant, j’ai pris un chemin à gauche qui semblait traverser les rizières qu’ils appellent ici Paddy (je ne suis pas sûr de l’orthographe). J’ai été arrêté au moins 150 fois par des gens qui me demandaient toujours où j’allais et pourquoi je marchais. Il semble incroyable pour ces gens qu’on puisse juste aimer marcher. Chaque fois que l’on me proposait de monter dans un véhicule, je refusais en expliquant pourquoi je faisais cela. Je ne sais pas s’ils comprenaient vraiment. Cependant, j’ai tout de même appris une chose en parlant dans les rizières. C’est, qu’en ce moment, les éléphants sont beaucoup trop loin pour que je puisse espérer en voir, surtout de jour. Un type m’a montré une direction, à quelques kilomètres, en me disant que si je me trouvais à cet endroit vers 10 h du soir avec une lampe, je verrais des éléphants. Oui, c’est ça, je vais me pointer dans la savane que je ne connais pas, en pleine nuit, avec une lampe, et je vais faire coucou aux éléphants. J’ai l’air d’un candidat au suicide ? Le fin mot, c’est que les rizières sont en pleines récolte et qu’ils tiennent les éléphants éloignés jusqu’à la fin de cette récolte. Il faut savoir qu’un éléphant, ça bouffe 200 kg par jour. Je ne sais pas combien il y a de têtes dans une harde, mais ça peut faire des dégâts. La fin de la récolte, c’est vers le 10 mars, ensuite les éléphants reviendront. Cela veut dire que si je ne peux en voir ailleurs – je ne veux pas aller dans un parc avec une jeep – il faudra que je revienne ici à la fin de mon séjour. Nous verrons bien.

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Rizières

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Rizières

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Lagune

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Lagune

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Les singes s'aventurent hors de la forêt

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Savane

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Savane


Faute de grives, j’aurais tout de même vu un grand nombre de grands oiseaux, surtout des échassiers et, mystère, des paons sauvages ! Je ne compte pas les singes dont on pourrait dire qu’ils pullulent.

J’avais les crocs, ce soir. Cela tombait bien, nos GO avaient organisé une BBQ avec, devinez quoi, un des énormes poissons que j’avais vu pêché hier sur la plage. En accompagnement, il y avait un buffet avec quantité de currys de légumes. La bière était fraîche, le repas excellent et la soirée sympathique, toujours en compagnie de mes deux chimistes Allemands et de ma copine Chinoise dont je parlerai, peut-être, demain car je commence à bailler.

 

 

 

Vendredi 24 février 

 

Le tsunami a frappé durement le Sri Lanka en 2004. Le Sud de la côte Ouest, en dessous de Colombo et aussi cette partie de la côte Est puisque, à ce que je sais, Arugam Bay et Batticaloa ont été touchées. Comment une vague peut-elle toucher en même temps les deux côtés d’une île ? Il me faudrait, je pense, un cours de physique des océans.

C’est idiot, mais on y pense, le soir en se couchant. Dans son lit, on entend les vagues déferler et on se dit que le tsunami est une vague comme les autres. Elle approche silencieusement et on ne l’entend que lorsqu’elle déferle. Le gouvernement est censé donner l’alarme en cas de récidive. Il y a de grandes antennes radar censées détecter une vague anormale et des sirènes mais,  – j’ai posé la question – personne ne sait combien de temps avant. J’ai entendu parler de deux ou trois minutes, autrement dit rien du tout. Ici, c’est tout plat. Le seul endroit où se réfugier sont les dunes à deux kilomètres au sud, mais il faudrait battre le record du monde de course à pied. Tu penses bien que ceux qui possèdent un véhicule ne vont pas attendre que tu enfiles ton pantalon. J’ai tout de même repéré, c’est con, un grand pilier portant des antenne téléphonique à environ 500 mètres. Trois minutes, du lit au pilier et grimper à 15 mètres, ça peut le faire, mais pas question de mettre les chaussures.

Pour être plus sérieux, on retrouve encore des traces ça et là, comme cette maison où il ne reste que la dalle et un petit panneau pour se souvenir.

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Les pêcheurs font partie de ceux qui ont été le mieux dédommagés. Des bateaux neufs ont été donnés par de nombreuses fondations et certains, je ne sais comment, se retrouvent maintenant à la tête d’une petite flottille.

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Un grand nombre de barques portent l'inscription du donateur


Concernant les maisons du bord de mer, il reste tout de même un mystère. Le camp où je loge, par exemple, a plus de huit ans d’âge, pourtant, il semble ne pas avoir bronché. Ont-ils reconstruit en utilisant les vieux matériaux ?  Il faudra que je pense à poser la question.

Je me suis fait un petit compte à rebours et je ne peux pas me permettre de rester plus longtemps ici, même si j’y suis bien. Il va falloir que j’obtienne une prolongation de visa et que je rejoigne Kandy avant jeudi prochain pour le faire. En espérant que je n’aurais pas à filer à Colombo en catastrophe.

Je suis allé jeter un œil au petit temple, mais il n’en reste pas grand-chose. J’ai demandé mon chemin à un type qui m’a dit de demander le « Mohoudou Maha Viale ».  Je me suis dit que j’allais oublier ce nom au bout de cinq minute, alors je me suis répété : Roudoudou, maman vit à l’Est. Ce qui a marché puisque lorsque j’ai demandé mon chemin à nouveau, j’ai répété bêtement : Roudoudou, maman vit à l’Est et le type m’a dit : c’est par là. Incroyable, non ?

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Ils ont trouvé le moyen de gâcher la photo de ce joli petit temple en suspendant un abat-jour juste au-dessus de la tête de la statue de Bouddha. C’est pas cool.


Comme j’étais seul sur le site, évidemment, le gardien est venu me brancher. Ils sont deux à se relayer pour garder 100 m2 de vieilles pierres. Je lui ai dit qu’il avait un boulot peinard et il a rigolé. Il a voulu absolument que  je prenne en photo le petit moine qui était en train de laver son Tuk Tuk, mais pas avec le tuyau d’eau à la main. Je suppose qu’il outrepassait ses droits.

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Je me suis perdu sur le chemin du retour. J’ai voulu prendre un raccourci, mais il y avait une infinité de rues en terres avec pleins de cul de sacs et c’était coton pour s’y retrouver. Comme toujours, la providence est venue à mon secours avec l’apparition d’un type en moto qui m’a fait monter à l’arrière et qui m’a emmené jusqu’à la route. Je vous laisse là, m’a-t-il dit, je n’ai pas de casque. Ah oui ! Parce qu’ici, contrairement à l’Egypte, les motards portent un casque. Il y a beaucoup de contrôles sur la route et même les chauffeurs de Tuk Tuk font gaffe. Ils ont peur de prendre un « ticket ». J’ai fait en marchand les deux derniers kilomètres durant lesquels j’ai observé que les chèvres ne mangeaient que les petites fleurs qui se trouvaient au bord de la route. Elles ne touchaient pas à l’herbe. Encore un truc que je ne savais pas.

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Le bord des routes est, parfois, bien aménagé

Ce soir, avec Issa, nous nous sommes assis près d’un vieux type déglingué en chemise blanche. Il était complètement shooté et pour cause, en plus de la bière, il fumait sans arrêt des petites cigarettes fines qui sentaient furieusement bizarres. Nous avons commandé, mais lui ne voulait rien. « Quatre bières font un bon repas », j’ai fait pour rigoler. « Tu l’as dit bouffi », m’a-t-il répondu en Français. Ce type était un pince sans rire. Le genre revenu de tout. Cela faisait 20 jours qu’il était là et il n’avait pas l’intention de bouger. Nous avons bien rigolé pour cette dernière soirée. Nous parlions en anglais pour qu’Issa Puiman comprenne. J’avais apporté mon ordinateur car les deux chimiste voulaient acheter un billet d’avion. Ils m’ont remercié en m’offrant un ananas que nous avons partagé. Issa m’a fait goûter sa salade de fruit au Curd et au miel. On a bu de bières. C’était sympa.

 

 

 

Samedi 25 février

Les trajets en bus se ressemblent. Ils sont longs et inconfortables. Je pars donc le plus tôt possible le matin, ce qui me laisse la possibilité d’utiliser mon après-midi. Mais aujourd’hui, après quatre heures de voyage et une nuit assez courte, je me suis payé une longue sieste qui m’a bousillé mon après-midi. Je suis installé au YMCA. Mais oui, vous savez bien, la chanson : waï m si éé ! Cela veut dire « Young Men Christian Association » (Association des jeunes Chrétiens).  C’est curieux de trouver ce genre d’hôtel dans un coin aussi paumé et encore plus de s’y installer, car il propose les meilleures chambre de la ville pour un prix dérisoire. Cela dit, ce n’est pas bien difficile. Il y a un seul autre hôtel centre ville, plus cher et moins bien. Le choix était donc vite fait. Ma chambre est grande et propre. Un peu austère, certes, mais avec trois lits, une salle de bain et un grand ventilateur au plafond bien utile. Il y a effectivement des jeunes chrétiens Sri Lankais qui occupent les autres chambres. Ils sont installés trois par chambre. Ce qui met la nuit à 230 roupies par tête, soit 1,50 Euros. Qui dit mieux !

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Traversée d'un village

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Changement de bus

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Un bébé qui prend ses aises

Une journée tronquée, donc, avec une petite ballade avant que la nuit ne tombe. Batticaloa, ce n’est pas l’endroit où je conseillerai de passer ses vacances. Il y règne une curieuse ambiance, feutrée, silencieuse. Les rares bruits vous parviennent assourdis, comme s’ils étaient avalés par la lagune présente partout. La vieille ville est en effet une île reliée par des ponts à une ville plus récente, mais qui ne le semble guère. Les bâtiments, les magasins, les maisons, les rues, tout cela est sans âge, comme si on avait construit la ville il y a des décennies, et que plus rien n’ait changé depuis. La guerre est passée par là, bien sûr. Les gens sont discrets, gentils et souriants, mais on ne sent pas d’étincelle. L’armée et la police sont encore très présentes. Ceci explique peut-être cela. Il y a encore comme un sentiment de méfiance, une difficulté à se lâcher.

Chemin faisant, je suis passé devant l’ONG Terre des Hommes. Il y avait trois gros 4x4 et deux vans flambant neuf garés dans le parking fermé par des grilles. Les seuls véhicules neuf que j’aurai vu. J’ai l’impression que les ONG ne s’oublient pas dans la distribution. Ils descendent, à ce que je sais, dans les meilleurs hôtels et roulent carrosses. Moi, je veux bien.

Pour le restaurant, je n’ai pas trop eu le choix. Je suis entré dans le Boui Boui qui m’a parut le plus propre, enfin, celui où il y avait le plus de lumière. J’ai mangé une espèce de paella locale. Une énorme assiette de riz frit mélangé à toutes sorte de trucs très épicés. Avec le coca, j’en ai eu pour moins de deux Euros. J’ai laissé 20 roupies au serveur aux pieds nus. Il les a discrètement empochés en secouant sa tête. Un signe qui semble vouloir tout dire.

Mon passage à Batticaloa ne me reviendra pas très cher. Tout en mangeant, je regardais ce type à la table à côté. Il découpait dans de vieux journaux les serviettes en papier du restaurant. Il y en avait sur ma table, roulées dans un verre. Je ne sais pas pourquoi, j’ai préféré utiliser un mouchoir en papier.

Sur le chemin du retour, J’ai remarqué que tout était fermé. Comme si le couvre feu était encore de mise. j’ai traversé la lagune totalement dans le noir. Des pêcheurs s’étaient installés les pieds dans l’eau. Chacun avait installé une lampe à gaz disposée sur une perche comme un fanal. Ils lançaient adroitement leur filet plombé et le ramenaient doucement. Les prises se limitaient à quelques minuscules alevins. Je suis reparti à tâtons retrouver ma chambre en me demandant combien il pouvait y avoir d’alevins dans un kilo.

 

 

 

Dimanche 26 février


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J’ai mis le nez hors de mon cocon à l’ombre et bien ventilé à 9 h pile. J’aurai aussi bien pu me doucher tout habillé car, 30 minutes après, mes vêtements étaient déjà à essorer. J’ai pas mal fréquenté les tropiques, mais je n’ai pas le souvenir d’une telle sensation, si on met à part les saunas, bien sûr. Je me suis arrêté au bord de la lagune écrasée de chaleur et j’ai regardé la surface de l’eau totalement lisse. C’était le grand calme blanc. Je ne parle pas du taux d’humidité qui a dû me foutre des champignons dans les poumons.  Se payer quatre heures de promenade dans ces conditions frisait l’entreprise héroïque, d’autant plus que le seul endroit qui a pu me sortir de ma torpeur se trouvait être le marché. Un classique, en somme.

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Je suis un peu dur, je sais, j’ai tout de même entendu un magnifique choeur venant d’une église perdue au fond de la vieille ville. Si j’y ajoute un fort construit par les Hollandais, mais qui ne se visitait pas, et la lagune où les petits praos de pêche glissaient en silence, j’ai fait le tour des centres d’intérêts de Batticaloa.

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Grand blanc

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Vieille ville

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Vieille ville

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Vieille ville

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Centre ville un dimanche matin

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Autour du marché, c'est un peu plus animé


Ce soir, c’était encore pire. J’ai erré dans les rues déserte, presque à tâtons, à la recherche d’une gargote. J’ai fini par en dénicher une qui m’a servi le pire repas depuis le début de mon séjour : un rôti, qui n’est pas ce que vous croyez, mais une espèce de crêpe feuilletée coupée en petits morceaux et passée à la plaque accompagnée de petits à-côtés. Soit une petite assiette d’alevins séchés au goût… disons, très fort, une petite assiette de bouts de cou de poulet au piment, et un morceau de poulet froid à déguster avec les doigts vu qu’il n’y a pas de couteau. Autant dire que je n’ai pas traîné.

Si vous voulez tourner un film d’horreur, c’est ici qu’il faut venir. Vous n’aurez pas à payer de décorateur. À 7 h du soir, l’ambiance est, comment dire… Fantasmagorique, voilà ! Les rues sont désertes. Les devantures sont fermées. De loin en loin, une ampoule blafarde projette faiblement des ombres bizarres. On croit voir des mouvements furtifs dans les ruelles transversales totalement dans le noir. Les corbeaux se rassemblent dans les arbres et sur les fils électriques. Ils vous observent. Ils attendent. Le silence glaçant n’est perturbé que par un bruissement d’aile et le bruit de vos pas assourdi par le sol en terre et, tout à coup, un vélo roulant sans lumière surgit juste devant vous puis disparaît. Pour tout dire, si quelqu’un avait crié « hou, le loup » je grimpais à un arbre.

J’ai retrouvé ma chambre en me disant que sortir des sentiers battus n'étais pas toujours facile. Il y avait néessairement un salaire à payer. Ça ne pouvait pas être toujours un enchantement. Cela me permettra d’apprécier d’autant plus le prochain coin paumé génial sur ma route.

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15 février 2012 3 15 /02 /février /2012 10:18


Lundi 13 février  


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Pour commencer, j’ai eu le fin mot au sujet du fruit que j’ai vu dans la forêt voici deux jours. Je rentrai de ma longue ballade matinale lorsque j’ai croisé un vieux monsieur qui peinait sous le poids de cet énorme fruit. Peu après, sur le bord de la route, je suis tombé sur l’endroit où il l’avait trouvé. Il en restait trois autres au sol, un peu abîmés. J’étais accroupi, en train de les examiner, quand une femme qui passait m’a lancé : « jackfruit ». D’après elle, les anciens l’utilisaient beaucoup pour la nourriture, mains moins maintenant. En revanche, les singes en sont très friands, ce dont je me doutais. Connaissant le nom, je suis allé me renseigner sur Internet. Je n’avais pas tout à fait tort en parlant de fruit à pain puisque l’arbre est une espèce proche de l’arbre à pain. Il est originaire de l’Inde, mais on le trouve dans la plupart des régions tropicales. Le jackfruit est appelé jaquier en français et peu peser jusqu’à 25 Kg. C’est, évidemment, le plus gros fruit qui pousse sur un arbre.

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Bien plus direct que la route et, finalement, moins dangereux pour les piétons.

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Centre ville

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Boui Boui, sur la route

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Salle de spectacle

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À l'entrée de la salle de spectacle. 

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Chambre Sri Lankaise

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De ma fenêtre

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En bas les habitations des ouvriers, en haut, le village sur la ligne de crête.

Haputale est un village perché à 1600 d’altitude. Ce qui explique pourquoi le train renâcle autant pour y grimper. Il se résume à une rue principale à peu près plane puisque construite sur la ligne de crête, et à quelques maisons de plus en plus pauvres au fur et à mesure que l’on dégringole les pentes. Où que l’on regarde, le paysage est superbe. De la fenêtre de ma chambre, il est, paraît-il, possible de voir la mer par temps clair. Ce qui est loin d’être le cas en ce moment. Ici, c’est la région du thé. C’est à quelques kilomètres que Sir Thomas Lipton à fait construire sa première fabrique de traitement. On a l’impression qu’il ne reste pas un centimètre carré disponible tellement la couleur verte est partout. On ressent une impression de bien être, aidé en cela par une température idéale.

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Pose pour les cueilleuses de thé.

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Plus le thé est en altitude, meilleur il est

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Ce sont les jeunes feuilles et les bourgeons qui font le meilleur thé

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Chaque cueilleuse récolte environ 20 kg de feuilles par jour

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Habitations des familles qui travaillent dans les plantations...

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et bungalow des planteurs.

Ce matin, j’ai fait une longue marche avec, au détour de chaque virage, toujours le même étonnement devant ces paysages uniques. Les gens sont souriants. Ils n’hésitent pas à s’arrêter un moment pour vous parler et répondre à vos questions. Dans les sentiers du bas du village, véritable dédale serpentant entre cabanes et jardinets, les enfants viennent vers vous pour se faire prendre en photo et vous ne pouvez que les contenter. Plus loin, sur les pentes couvertes de thé, je suis resté longuement à observer le travail de la cueillette.

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J'espère que cette vieille dame n'emprunte pas cet escalier de terre quand il pleut !

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Ruelles à flanc de montagne

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Sir, sir ! Photo please !

Seul petit bémol dans le tableau, la bouffe du restaurant de l’hôtel n’est pas merveilleuse. Le problème, c’est qu’il n’y a pas d’autres endroits pour manger. Heureusement, ils servent de la bière, ce que j’apprécie, le soir, après une journée de marche et une bonne douche, lorsque je discute avec des voyageurs de rencontre.

Le ciel s’est couvert, en soirée. Il est tombé quelques gouttes. J’imagine qu’il pleuvra demain.

 

 

Mardi 14 février 


J’avais décidé, aujourd’hui, de me rendre à Dambatenne, où se trouve la première fabrique de traitement du thé créée par Sir Thomas Lipton. Le village se trouve à environ 11 Km d’Haputale. Pour s’y rendre il faut, soit emprunter le taxi à touriste qui revient à 500 roupies, soit le minibus affrété pour les ouvriers de l’usine qui coûte 25 roupies. Inutile de dire que mon choix a été vite fait. Ce minibus serait plutôt un mini-minibus puisqu’il n’y a que sept places assises. Reste environ deux mètres carré où s’entassent les autres voyageurs. Il faut dire que les gens des places assises sont de bonne composition puisqu’ils ont presque tous un quidam sur les genoux. Comme je me voyais mal demander à une nana de me prendre sur ses genoux, j’ai fait le voyage debout, enfin, courbé devrai-je dire, puisque le plafond du minibus ne doit pas culminer à plus de 1,50 mètre. Par chance, je pouvais me tenir au siège du chauffeur, étant placé juste derrière lui. Au départ nous étions 21, en comptant les 3 types accrochés à la portière, mais que j’hésite à placer dans le bus vu que tout leur corps en dehors des pieds voyageait à l’extérieur.

Dès le départ, j’ai vite oublié le léger désagrément de ma position pour me concentre méchamment sur la route et les manœuvres pour le moins surprenantes du chauffeur. Je vous laisse juge. Tout d’abord, il était pieds nu, ce qui n’a probablement rien d’inhabituel ici. Ensuite, comme son téléphone sonnait sans arrêt, il conduisait d’une main sur une route de trois mètres de large qui longeait des précipices à 45°. Pour finir, il mettait le minibus en roues libres dans toutes les descentes pour, probablement, économiser du carburant. À entendre le couinement désespéré des freins, une seule question se posait, l’essence coûtait-elle si cher pour qu’il se permette de fusiller ses plaquettes. Je vous passe les difficultés à croiser des véhicules dont le scénario immuable était le suivant. Un grand coup de patins pour se trouver nez à nez avec un autre bus toujours plus gros, ce qui l’obligeait à reculer sans visibilité - puisqu’il n’avait pas de rétro extérieur - simplement guidé par les types pendus à la portière, pour lesquels une roue à 10 cm du vide paraissait une marge suffisante pour continuer de faire signe que tout allait bien. Tout cela ne semblait guère impressionner les stoïques voyageurs qui continuaient à papoter comme si de rien n’était. L’habitude, sans doute. 

J’ai effectué la visite de la fabrique tout seul avec le guide. Une chance puisque j’ai croisé en arrivant un petit groupe de touristes Allemands qui embarquait dans leur bus pour retourner certainement à leur hôtel luxueux de la côte. Ils avaient tous dans les mains des boîtes de thé et semblaient pressés de repartir car la pluie menaçait sérieusement.

La chaîne de fabrication, des jeunes feuilles vert tendre aux quelques moutures de qualités différentes m’a grandement intéressée. On ne s’imagine pas le nombre d’étapes nécessaires pour arriver à simplement produire du thé. Pour ne pas être ennuyeux, voici juste quelques photos commentées.

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Chacun de ces bacs contient 1500 kg de feuilles. De l'air chaud arrive par en dessous pour un séchage partiel. On voit la puissance de l'air car les feuilles s'envolent quand on les soulève.

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Les feuilles sont ensuite emmenées dans cette salle où cette ouvrière les fait passer par un tube dont l'ouverture se trouve à raz du sol.

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Les feuilles tombent dans une rouleuse.

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Ensuite, elles sont éjectées sur ce tapis roulant

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qui les montent jusqu'à la broyeuse.

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En sortie de broyeuse la mouture est tamisée sur des tamis de plus en plus gros.

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Le meilleur thé provient de la mouture la plus fine, à gauche.

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Le plus important est la fermentation. Le moment ou on la stoppe détermine la qualité du thé.

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Le séchage à 250° est la dernière étape avant la mise en sac.

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La plaque d'origine de la fabrique est toujour dans le hall.

Le village de Dambatenne se trouve au cœur de plantations accrochées sur des pentes magnifiques. On dit que Sir Lipton montait au sommet de la montagne pour embrasser d’un seul coup d’œil son domaine. J’avais l’intention d’y grimper - 5 heures aller et retour - mais le mauvais temps m’en a dissuadée. À la place, sous une pluie fine, j’ai fait une longue promenade au milieu des plantations, en empruntant les chemins dallés qui les traversent.

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Offrandes

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Chemin dans les plantations 

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Pour finir, l’autre comique à raison sur toute la ligne au sujet du K Way.  Je n’en avais pas porté depuis des lustres et, mon avis, c’est que c’est une merde pas bonne. Bien sûr, on a le haut au sec, mais en contrepartie, l’eau glisse et vous trempe le pantalon en un rien de temps. À la première occasion, je m’achète un poncho.

 

 

 

Mercredi 15 février

Ce matin, j’ai acheté un billet de train pour le village d’Idalgashinna, premier arrêt sur la route de Hella où je ne veux pas mettre les pieds car, d’après mes renseignements, il y a plus de touristes que d’habitants. Cela me conduit à faire une parenthèse au sujet des guides touristiques. Le soir, dans la petite salle à manger de ma Guest House, je regarde avec un certain effroi, tous les convives des tables autour de moi, potasser le Lonely Planet comme si leur vie en dépendait. Immanquablement, il y a toujours quelqu’un qui, voyant que je suis seul, vient me demander si je connais ce coin ou cet autre. En général, c’est non, car j’essaye d’éviter les coins super recommandés par les guides. On a toutes les chances d’y rencontrer la moitié de la planète. Je fais quelques exceptions si je sens qu’il y a réellement un intérêt particulier à m’y rendre. Par exemple, concernant Hella, allez savoir pourquoi les guides expédient tout le monde vers ce village, alors que si vous consultez les habitants, tous vous disent que Haputale a beaucoup plus de charme. Pour les randonnées, idem. Il y a des centaines de randonnées possibles, pourquoi aller marcher systématiquement sur les chemins balisés ? Le problème des touristes, c’est qu’ils sont là pour 10 ou 12 jours et qu’ils ne veulent rien manquer. Ils s’imaginent que ce que recommandent les guides, c’est nécessairement le top. J’essaye de leur expliquer que les guides sont obligés de choisir et qu’ils ne reflètent que les préférences de ceux qui les écrivent. Sans compter que les choses changent vite. Hier, un couple me racontait que, poussés par leur guide, ils étaient allés voir la magnifique plage déserte de Mirissa. Sauf qu’il y a maintenant des hôtels sur la plage. Le gros défaut du LP, c’est qu’il n’est, apparemment, mis à jour que tous les trois ans. Tout ce qu’il raconte est donc sujet à caution, en particulier concernant les prix pour lesquels c’est du grand n’importe quoi. En ce qui me concerne, je n’utilise le guide que pour les transports et l’hébergement, domaines, il faut le reconnaître dans lesquels il est bien utile. Ensuite, pour les trucs que je veux faire, je parle beaucoup aux habitants et suis assez souvent mon inspiration. Bien sûr, je passe à côté de pas mal de choses mais, franchement, rien qu’à l’idée de me retrouver avec une meute me coupe l’envie.  J’ai, par exemple, envie d’aller voir un parc en particulier, mais je n’irai pas si je ne trouve pas un moyen d’être peinard.

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Vues du village d'Igalnashinna


Mais revenons à Idalgashinna. Petit village hors du temps dont le contraste entre la modestie des habitations et la splendeur des paysages est assez émouvant. J’ai été arrêté à chaque pas par des gens de tous âges qui voulaient tout savoir de moi : d’où je venais, si j’étais marié, si j’avais des enfants, quel était mon métier… J’ai dû m’arracher à force de sourires, car mon idée était de revenir à pied à Haputale en suivant la voie de chemin de fer.

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Il vaut mieux se dépécher, on ne sait jamais.

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Il n'y a eu qu'un train pendant ma ballade.

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Avant de prendre le train, j’avais acheté des Kotthus, sorte de crêpes épaisses fourrées de toutes sortes de choses indéfinissables, mais fort à mon goût. Je les ai sortis de mon sac après un kilomètre, je me suis assis sur une borne, et j’ai mangé en me disant qu’il ne fallait pas banaliser la beauté. Parfois, on ne la remarque plus, si elle est toujours présente. C’est dommage.

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Ça ne fait pas vite. 

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J’ai effectué les dix kilomètres de voies ferrées en presque trois heures. Une allure d’escargot, mais que de nombreux arrêts contemplatifs justifient. La voie ferrée suit la ligne de crête, ce qui fait que la randonnée est parfaitement plate bien qu’à 1600 m d’altitude. Il y a assez souvent des précipices impressionnants et pas mal de petites cascades qui passent sous la voie pour finir dans la vallée.

 

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De temps à autre, je croisais une personne. On se faisait un signe de tête et chacun continuait sa route. À la fin d’une courbe, j’ai avisé une vieille femme qui ramassait des grandes branches mortes. Je lui ai demandé où elle habitait car je ne voyais rien alentour. Elle m’a désigné le haut de la montagne. Je suis resté un peu interloqué. Ça faisait vraiment un bout, considérant qu’elle allait se trimballer son fardeau.

 

 

 

Jeudi 16 février

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Exaspéré par la lenteur d’Internet dans les Guest Houses, et me doutant que j’allais vers encore plus de déboires pour la suite du voyage, j’ai pris le taureau par les cornes et me suis payé une clé 3G locale. J’ai passé une plombe dans le magasin « spécialisé » avant que les formalités téléphoniques soient terminées car il faut montrer patte blanche.

Rassuré sur le fait que je n’aurais plus à chercher le mouton à 5 pattes pour me loger, j’ai pris mon bus pour Badulla. Chance Inouïe, il y avait une place de libre au premier rang à gauche. Oui, à gauche, parce que les deux places de droites, derrière le chauffeur, sont réservées aux moines. En général, elles sont occupées. Les moines semblent voyager beaucoup. Ils bénéficient de ce privilège à fond car je ne les ai jamais vus faire mine de laisser la place à une femme enceinte ou une vieillarde.

Dans ces bus, il n’y a pas de soute à bagages. J’ai donc posé mon sac sur le capot moteur intérieur. Il n’y a qu’une trentaine de kilomètres entre Haputale et Badulla, mais il faut 1h30 pour les parcourir. Dans ce pays, il ne faut pas résonner en distance mais en temps. Ayant une vue imprenable sur le chauffeur, j’ai constaté qu’il mâchait une herbe qui devait lui donner la pêche. J’ai espéré qu’elle n’était pas hallucinogène. Il se penchait à sa fenêtre toute les trente secondes pour cracher. Ce n’était pas très ragoûtant. Badulla est le terminus de la ligne ferroviaire. C’est une des plus vieille ville du pays. Elle était appréciée des Britanniques au siècle dernier. Il en reste un hippodrome, un club de cricket et de jolis jardins.

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Facile pour surveiller mon sac.


Aussitôt à ma pension, j’ai testé ma clé 3G mais elle ne fonctionnait pas. Il y avait certainement quelque chose qui m’avait échappé. J’ai dragué toute la ville, passé une heure dans une boutique qui n’y comprenait rien, pour enfin tomber sur quelqu’un de compétant qui a réglé le problème et m’a expliqué, en prime, la marche à suivre pour le futur. Il a changé ma carte SIM et réinitialisé mon enregistrement gratuitement. Ce que ne m’avait pas dit le vendeur de la clé, c’est qu’il me fallait acheter des heures pour accéder à Internet, exactement comme avec un téléphone prépayé. Et moi, béotien sur le sujet, je n’avais pas relevé.

De retour à ma pension - sous la pluie - j’ai eu la bonne surprise de voir que la connexion était très rapide. Pour 500 Roupies par semaine, (3,30 Euros), j’ai droit à 24 heures de connexion et 2 Gigabits. Me voilà tranquille. En prime, le gars m’a expliqué que je pourrais faire décoincer la clé dans un autre pays et l’utiliser avec une nouvelle carte SIM.

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Photo oubliée hier, comme je n'en ai pas fait aujoud'hui...


Ce soir, je mange sur une immense terrasse couverte au troisième étage du meilleur hôtel local. Je suis le seul blanc pour la première fois depuis mon arrivée. Les touristes ne poussent pas jusqu’ici. Comme je le disais hier, ils s’arrêtent à Ella. C’est un peu bizarre parce que je suis seul à ma table alors que la salle est remplie de grandes tablées de huit ou dix convives. Ce ne sont que des hommes. J’ai l’impression que ça discute beaucoup travail. Peut-être un genre de congrée. Ce que je peux remarquer, c’est qu’ils mangent beaucoup. Pour ma part, j’ai pris un curry de poulet et une bière. Le curry se compose d’un morceau de poulet dans une sauce épicée, d’un gros plat de riz blanc et de six petits plats de divers accompagnements que je n’arrive jamais à bien identifier. J’ai droit à une cueillere mais pas de couteau. Pour couper le poulet il faut se démerder avec les doigts. Je remarque que je suis le seul à m’aider de la cueillere pour manger, les autres portent la viande directement à la bouche et mangent le reste avec les doigts. Je n’en suis pas encore là. 

 

 

 

Vendredi 17 février


Pour mon petit-déjeuner, j’avais repéré un endroit pas trop mal et décidé de m’en payer un typique. Quand je dis payer, c’est façon de parler, vu que cela m’a coûté 80 Roupies, soit 55 cents d’Euros, café compris.

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Tu ne payes que ce que tu consommes


Après ce calage en règle, j’ai pris le bus pour me rendre aux chutes de Dunhinda qui se trouvent à cinq kilomètres de Badulla. Pour s’y rendre, il faut d’abord grimper un col, puis s’arrêter à mi-pente de la descente pour prendre le chemin qui descend jusqu’aux chutes. Les chutes en soi, ce n’était pas ce qui m’intéressait le plus. Ce qui m’attirait, c’était le sentier pour s’y rendre. Une demi-heure de marche à peine, mais à travers une belle forêt tropicale peuplée de singes et retentissant de cris d’oiseaux. Le sentier était assez difficile à certains moments mais praticable par le plus grand nombre. Je suis arrivé tout de même complètement trempe tellement il faisait chaud et humide.

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Les chutes tombent de 60 m de haut dans un bassin naturel qui fume de bruine. Certains diraient que le site n’est pas grandiose, mais ou commence la limite.

Sur le chemin du retour, il s’est passé quelque chose de réellement comique. Un couple de Sri Lankais descendait doucement en piochant dans un paquet de Chips locale. J’étais, pour ma part, averti qu’il ne fallait jamais manger sans précautions dans la forêt, mais ce couple ne l’était apparemment pas. Et, juste au moment où on se croisait, un singe est apparu de nulle part, à sauté sur la femme et lui a piqué son paquet de Chips. Après quoi, il est allé s’installer sur un rocher et s’est mis à les manger. Tout autre animal qu’un singe aurait déchiré le paquet, mais lui piochait délicatement dedans comme un enfant qui aurait bien appris sa leçon. Où va donc se nicher l’anthropomorphisme. La pauvre femme a faillie se trouver mal. Elle venait certainement d’avoir la peur de sa vie. Cependant, elle n’était pas blessée ; plus de peur que de mal, en somme.

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Chemin de descente

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Singe chapardeur


Arrivé sur la route, il était encore tôt. J’ai donc décidé de rentrer à pied à Badulla. D’autant plus que j’avais remarqué d’intéressantes choses en venant en bus. Cinq kilomètres de plus, ce n’était pas la mer à boire, même si le col grimpait sec. Il fallait juste que je sois à la gare avant 14h pour ne pas rater mon bus. Parlant de bus, je retire tout le mal que j’ai dit des bus Égyptiens. Tout bien considéré, ils sont impeccables. Si jamais, un de ces jours, vous tombez sur une brève du genre : « Sri Lanka, un bus tombe dans un ravin, 200 morts ! » Ne croyez pas à une erreur du copiste, il s’agit bien du nombre de personnes pouvant entrer dans un bus. J’en suis témoin.

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Une vue de ma marche de retour vers Badulla

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Tout le monde me disait bonjour sur la route. Ici, un type m'a dit de monter.

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Si j'ai bien compris - ils ne parlaient pas Anglais - il s'agit d'une petit carrière de chaud pour enduire les maisons. Tous le travail est manuel.

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Je ne sais pas si les vaches sont sacrées, mais elles font ce qu'elles veulent.


Je dois être dans une période de chance car il ne restait qu’une place à mon arrivée et, devinez quoi, exactement la même que celle que j’occupais hier. Dix minutes plus tard, on n’aurait plus fait entrer un enfant de cinq ans. Ce qui est impressionnant, c’est que personne ne râle. Les gens ont même le sourire. Les gens debout font tout de même payer leur chance aux personnes assises en leur mettant d’autorité leurs bagages sur les genoux. De cette façon, ils peuvent se tenir convenablement à deux mains, ce qui est nécessaire si on considère la conduite assez heurtée de nos amis chauffeurs. J’ai ainsi eu la garde du sac et du parapluie d’une dame, laquelle m’a fait assez confiance pour me demander de prendre son porte-monnaie et de payer le receveur au moment où il passait pour encaisser.

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En route pour prendre mon bus.

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Dans le bus

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Les moines ont la belle vie


 

Nous avons mis 2h30 pour faire les 45 Km qui séparent Badulla de Monaragala. 2h30 de montées, de descentes et de virages sans fin. Je suis, heureusement, aguerri au mal de mer, mais ce n’était pas le cas de la jeune femme à côté de moi. Elle n’avait pas du bien digérer son Curry car, à un moment donné, elle m’a demandé si on pouvait changer de place. Elle était à peine installé près de la fenêtre qu’elle s’est penchée pour aller au « refile ». Dans ces conditions, 2h30, cela passe assez vite, d’autant plus qu’il s’est mis à pleuvoir et que le chauffeur refusait obstinément de mettre ses essuie-glaces. Etaient-ils en panne ? Mystère. Toujours est-il qu’il ne semblait pas plus incommodé que ça alors qu’on n’y voyait franchement plus rien.

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Manifestation scolaire dans un village. Pris de la fenêtre du bus.

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Village sous la pluie. Pris de la fenêtre du bus.


 Après ça, j’ai passé mon tour pour une visite de la ville que j’ai remise à demain. J’avais besoin d’une bonne sieste, d’un bon repas et d’une bonne nuit.

 

 

 

Samedi 18 février


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Ce matin, j’ouvre les yeux, je regarde ma montre : 6h30. Mon regard glisse vers la baie vitré qui donne sur un parc pourvu d’énormes arbres. Et là, assis sur la rambarde de mon balcon, un singe me regarde. Je lui fais coucou et, pour toute réponse, il se met à chercher une puce sur les poils blancs de son ventre et la bouffe en me regardant. Je me demande ce que je dois en penser.

Plus tard, je passe le long du parc qui comprend une aire de jeu avec des balançoires, des tourniquets, et des toboggans. Il y avait des mères qui surveillaient de jeunes enfants. Que des singes soient perchés sur les balançoires, c’est tout à fait normal, me suis-je dit, mais que fait cet énorme varan au milieu des enfants.

En dehors de ces deux petites anecdotes, j’ai vécu une journée bien remplie. Tout d’abord, j’ai fait un tour en ville. Sans surprise, j’étais le seul voyageur à arpenter les rues. Comme d’habitude je dois répondre sans cesse aux sourires et aux bonjours. Je pourrais faire des tonnes de photos tant les gens apprécient de se voir sur l’écran de mon appareil. Mais il faut bien que je fasse des choix.  Le soleil tapait dur aujourd’hui. Je portais mes lunettes de soleil. Cela m’a amené à faire la constatation que personne dans la rue ne porte de lunettes. Ni de soleil, ni de vue d’ailleurs. Soit cette population possède de bons yeux, soit cela coûte trop cher, soit ils manquent d’informations. Peut-être tout à la fois. À bien y réfléchir, je n’ai vu aucun marchand de lunettes. Il en existe certainement, mais ils sont bien cachés.

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Le marché

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Vendeur de légumes

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Rue principale de Monaragala

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Machine à extraire l'huile de coco

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Les camions sont tous peints comme les camions de cirque de chez nous


Après cette mise en bouche, j’ai pris la direction de la forêt. Chemin faisant, je suis passé devant un petit temple juste au moment où un vieux couple descendait d’un Tuk Tuk. La femme louchait affreusement et portait une noix de coco. Tous deux sont entrée dans la cour non sans m’avoir dit bonjour. Le vieux monsieur s’est dirigé vers le prêtre et a palabré quelques instants. Après quoi, il a dit quelque mot à sa femme qui s’est dirigée vers une pierre plate et carrée qui dépassait à peine du sol. Elle s’est longuement concentré, puis à levé la noix de coco au-dessus de sa tête et la balancé de toutes ses forces sur la pierre. Ensuite, elle a pris le bras de son marie, et tous deux sont remonté dans le Tuk Tuk. Il va encore falloir que j’aille me renseigner sur ce rituel curieux.

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Je devine que la rituel de la noix de coco est une offrande à cette divinité

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La pierre et la noix de coco

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Le petit temple vue de l'extérieur


Continuant mon chemin, je réfléchissais à ce que je venais de voir quand mon regard a été attiré par une allée décorée d’oriflammes qui montait vers un lieu invisible. Intrigué, je me suis dirigé vers une petite baraque en bois toute proche et j’ai demandé au marchand de bananes si je pouvais monter jeter un coup d’œil. Il m’a fait non de la tête, ce qui, ici, veut dire oui. Je sais, il faut s’habituer à d’autres mœurs et usages, c’est fou non ?

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Fort de cet avis autorisé, j’ai grimpé la côte jusqu’à arriver à ce qui ressemblait à un monastère, d’autant plus qu’un personnage assis sur la rambarde d’un préau me faisait de grands signes de bienvenue. Enhardi, j’ai escaladé des escaliers pour arriver sur une petite esplanade où des gens s’affairaient à préparer de généreuses assiettes de fruits. Le lieu était agréable, fleuri, ombragé et silencieux. Sur ma droite, se trouvait une grande salle aux murs à claire-voie occupée par un grand nombre de moines qui mangeaient en silence. J’ai hésité en haut des marches, ne sachant que faire, mais un homme âgé qui semblait diriger les manœuvres s’est approché de moi et m’a gentiment souhaité bienvenue. « Allez, m’a-t-il dit, disposez du lieu comme vous l’entendez. » J’ai posé mes chaussures et mes chaussettes, puis je lui ai demandé qu’elle était cette cérémonie. « Plus tard, ma-t-il dit, et d’un grand geste, montrant la colline, faites d’abord connaissance. » J’ai fendu l’assemblée qui me faisait mille sourires et je suis parti en exploration.

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Entrée du monastère


La colline était superbement aménagée. De grands escaliers de pierres, traversant des jardins un peu fous, menaient à des habitations pimpantes et, tout en haut, dominant le site, se trouvait ce qui m’a paru être un sanctuaire. Il y avait un homme qui semblait en garder l’entrée. Sans trop savoir si cela était correct, je lui ai demandé ce qu’il y avait à l’intérieur. Sans un mot, il a alors ouvert les portes à deux battants et à découvert une grande statue de Bouddha dans la position du lotus. La statue occupait toute la pièce. Elle était magnifiquement décorée et, à ses pieds, une multitude d’offrandes et de fleurs de lotus avaient été déposées.

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On devine les moines dans la salle à manger

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Maison de moines

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La statue de Bouddha est à l'intérieur de ce sanctuaire

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Maison de moines


Après une demi-heure de promenade, j’ai vu arriver une nuée de moinillons dont le plus âgé ne devait pas avoir plus de 16 ans. Ayant terminé leur repas, ils s’intéressaient maintenant à moi. 53 moinillons me faisant la conversation sans que j’en comprenne un traître mot, c’était une situation assez cocasse. Heureusement, après quelques minutes de langage des signes, le vieil homme qui m’avait accueilli leur a dit d’aller s’occuper ailleurs et m’a tenu ce langage : « Vous êtes notre invité. Le repas vous attends. » Le moyen de refuser.

Nous sommes entrée dans la salle où les moines avaient mangé auparavant. Elle avait été nettoyée et l’on avait installé une sorte de buffet local. Sur un banc étaient alignés une douzaine de sauts dont, à part le riz, il m’était impossible d’identifier le contenu. Mais de cela je commençais à avoir l’habitude. Le curry n’avait presque plus de secrets pour moi. Je me suis servi une assiette et, avant de manger, j’ai renouvelé ma question sur l’événement qui se passait ici. « Patience, m’a-t-il dit à nouveau, mangez, vous aurez la réponse  plus tard. »

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Mon curry


Tout en mangeant, le vieil homme m’a bombardé de question sur ma vie et aussi sur ce que je savais du Bouddhisme. « Vous comprenez, il est préférable de savoir à qui nous avons à faire m’a-t-il dit finalement. C’est un événement peu courant qui se tient en ce moment. Ici sont réunis tous les jeunes moines de la région pour une session d’étude. » S’en est suivi une conversation très enrichissante que je ne vais pas vous infliger. Sachez tout de même que les moines sont nourris tous les jours par la population. Ces gens divisent leurs revenus en quatre parties dont une est consacré à l’entretien des moines. Il y avait dans cette salle une trentaine de personnes qui donnaient beaucoup de leur temps et de leur argent pour Bouddha. Tout ce qu’ils donnaient dans cette vie leur promettait une nouvelle vie meilleure.

Après le curry, nous avons mangé du yaourt fait maison et des fruits et, quand j’ai senti le moment venu, j’ai dit au revoir à tout le monde avec forts remerciements et courbettes.

Pour finir, la randonnée que j’avais prévue dans la forêt est tombée à l’eau, mais demain est un autre jour.

 

 

 

Dimanche 19 février 

J’ai fait aujourd’hui la randonné que j’ai reporté hier. Une randonnée, une nouvelle fois très agréable, sur un chemin tracé le long d’une rivière qui se frayait un passage à travers de gigantesque éboulis de roches et d’hévéas superbes. Parfois, un gué traversait la rivière et le chemin s’enfonçait dans la forêt où j’ai eu la surprise de découvrir des maisonnettes cachés sous les feuillages de bananiers. Je n’étais pas seul. Il y avait les singes, bien sûr, mais aussi l’allée et venue des gens qui se rendaient chez eux où descendaient à la ville. Ces maisons isolé ne possèdent pas l’eau courante. Les gens descendent à la rivière pour prendre leur bain et laver le linge. Ils se lavent tout habillé. Je l’ai remarqué à plusieurs reprise en passant au bord de ruisseaux ou même, récemment, devant une cour où une dame se lavait, près d’un tonneau, en gardant son sari. Comme j’ai remarqué, également, depuis le début de mon séjour, que les enfants étaient adorables. Les familles sont nombreuses, mais les aînés prennent soin des petits avec beaucoup d’affection. Il n’est pas rare de voir une gamine de dix ans s’occuper de ses frères avec beaucoup de sérieux.

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Lessive

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Gué

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Maisons en forêt

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Cette petite famille vient se laver à la rivière. La grande a posé le savon sur un rocher pour la photo. Pas de serviette. Ils doivent sécher au soleil.

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Ces 4 enfants descendaient de cette cabane

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Ingénieux système pour protéger les prises !

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Ce singe garde t-il la tombe de cette jeune fille sise au milieu de nulle part ?


Il était encore tôt à mon retour en ville, j’ai alors décidé de faire un saut jusqu’au village de Maligawila, plus au sud, pour voir une statue géante du Bouddha. Cette statue de 11 mètres se dresse dans la forêt sans qu’on sache réellement pour quelle raison elle se trouve là. Pour tout dire, ce fût un chemin semé d’embûches. Maligawila ne se trouve qu’à une vingtaine de kilomètres de Monaragala, mais il m’a fallu deux changements de bus et 1h30 pour y arriver et autant pour revenir, évidemment. Dans les campagnes, il est très rare de trouver quelqu’un comprenant un peu d’Anglais, c’est donc toute une gymnastique pour être sûr de prendre le bon bus. La route en soi n’est pas mauvaise, mais les arrêts sont nombreux, pour ne pas dire légions. La raison en est qu’il n’y a pas d’arrêt fixe. Il suffit de faire signe et le bus s’arrête, que ce soit pour monter ou pour descendre. Il faut compter aussi avec les vaches couchées sur la chaussée, les paysans qui mettent leur maïs à sécher sur de grandes bâches qui étalent jusqu’au milieu de la route et les feuilles de bananiers qui viennent, de temps à autre, taper sur le pare-brise quand le chauffeur serre un peu trop à gauche.

Lorsque je suis descendu du bus, je me suis demandé comment j’allais trouver mon chemin. En premier lieu, le village se résumait à rien du tout. Il y avait bien une école sur le bord de la route, mais où étaient les maisons, et où étaient les gens. J’ai étudié un instant la topographie et je me suis rendu compte que la forêt ne s’étendait que dans une direction. J’ai longé la route jusqu’à trouver un chemin qui s’enfonçait dans les bois. J’ai suivi ce chemin et j’ai vu un vieux panneau à demi caché par les feuilles sur lequel je pouvais lire le mot « Archéologique » écrit en Anglais. Derrière ce panneau, je pouvais deviner un sentier qui traversait une espèce de marécage genre Bayou. Ce n’était pas trop engageant, mais s’il le fallait. Et juste comme je posais le pied sur le sentier, j’ai vu un vieil homme arriver. Il marchait pied nu et avait relevé son vêtement traditionnel pour en faire une sorte de short. Le pauvre vieux était maigre à faire peur, mais sortait tout de même de la forêt. Parfois il ne faut pas chercher à comprendre.

Dites-moi, mon brave, lui ai-je demandé en Espéranto, ceci est-il bien le chemin qui mène au Bouddha ? Quoi non ? Vous êtes sûr ? Il faut continuer tout droit ? Ce ne sont pas des signes que j’interprèterais mal que vous me faites. Parce qu’avec vous, comme non veut dire oui…

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Bouddha en vue !

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Cela vallait 3h de route, non ?


Ce soir, devant ma bière, tout en regardant d’un œil le vidéo gag local, j’ai eu un petit frisson rétrospectif. Qui sait, je me serait peut-être perdu et on n’aurait plus jamais entendu parler de moi. (Je plaisante).

Tiens, parlant du vidéo gag, ce sont toujours les mêmes choses qui font rire la planète. Le staff de la pension est plié en deux parce qu’un singe fait du cheval sur un gros chien. Ouai, finalement, c’est assez marrant.

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7 février 2012 2 07 /02 /février /2012 17:51

 

Lundi 6 février

 

Un feu rouge de plus (je dis ça pour Valérie) et la grève à l’aéroport était le dernier de mes soucis car, dois-je le voir comme un heureux présage, à l’image de Phileas Fogg courant derrière son tortillard pour Calcutta, j’ai sauté dans le train juste devant le nez du chef de gare qui sifflait le départ. Sauf que là, ce n’était pas un factotum qui traînait les bagages, mais ma pomme qui sprintait avec son sac de treize kilos. C’est ce qui s’appelle ras la culotte, j’ai dit à « l’encasqueté » hilare, alors que les portes se fermaient.

Après ce départ un peu limite, les étapes du voyage se sont emboîtées sans accrocs, avec toute l’huile qu’il fallait dans les rouages : RER A à la gare de Lyon, Changement pour le B au Châtelet et vol pour Frankfort où je me suis repéré comme un chef pour arriver Terminal B porte 42, juste comme on appelait les passager pour Colombo.

J’écris ce commentaire de Dubaï où l’avion fait le plein, car c’est un petit Boeing incapable de faire le trajet d’un coup. La descente le long de la côte Iranienne par une nuit sans nuage à été on ne peut plus intéressante. De mon hublot, j’ai pu observer une grande quantité de bateaux illuminés jouant aux lucioles sur les eaux noires du Golfe Persique. J’imaginais cette côte un peu moins fréquentée. L’arrivée sur Dubaï, langue de terre bordée d’îles de sables, est spectaculaire. Vu du ciel, on observe un plan de ville à l’Américaine avec de longues avenues rectilignes qui s’entrecroisent. Cet ordonnancement est, de temps à autre, perturbé par de gigantesques buildings dont je pouvais quasiment apercevoir les habitants des derniers étages à travers leurs fenêtres. Au passage, je remarque que l’électricité ne doit pas coûter bien cher, vu les milliards de kilowatts qui doivent brûler simplement pour l’éclairage des autoroutes, qui, notez le bien, sont à 6 voies dans chaque sens.

14 heures de vol avec les escales, c’est un peu longuet, mais j’ai tout mon temps, n’est-ce pas ? D’autant plus que j’avais un couple d’Allemand à côté de moi qui ne parlait pas une broque d’anglais. J’ai passé mon temps penché au hublot pour voir défiler la campagne Allemande enneigée, puis ce matin, le sud de l’Inde et les montagnes du Kerala.

La côte du Sri Lanka vient d’apparaître. Je vais plier et poster ça ce soir.

 


Mardi 7 février

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J’ai cru pendant un moment devoir me passer de mes affaires pour quelques jours. Il ne restait plus que moi devant le tourniquet vide et je commençais à chercher des yeux le bureau des réclamations quand un gars avec un badge est venu me dire que les bagages venant de Paris attendaient sur un autre tourniquet. J’ai récupéré mon sac sans râler, changé de l’argent, et la porte automatique de l’aérogare s’est ouverte. J’ai  fait deux pas, posé mon sac au sol, ôté ma veste, ma polaire, mon tee shirt à manches longues et regretté  de ne pouvoir changer mon pantalon doublé pour l’autre en toile. Après les -7 de la veille, et bien que je m’y attendais, la chaleur et l’humidité m’ont, tout de même, un petit peu surpris.

Pour commencer, j’avais décidé d’éviter Colombo, car je devrai me rendre à la capitale dans trois semaine pour prolonger mon visa. J’ai donc pris un Tuk Tuk (prononcer Touk Touk) pour me rendre à Negombo, plus au Nord. Une demi-heure de route assez fun à bringuebaler à l’arrière de ce drôle d’engin jusqu’à ce qu’il me pose en bordure d’une grande plage.

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Tuk Tuk

Ma Guest House se trouve au bord de l’eau, à environ 1 Km du village. Au sud se trouve le lagon, fameux dit-on pour les crabes délicieux qu’on y trouve. Au Nord, la plage s’étend vers des lointains invisibles. Plus on remonte, plus le prix des hôtels s’élève. Je suppose qu’on doit les construire de plus en plus beau. Inutile de dire que ma sympathique Guest House se trouve au début de la chaîne. J’ai cependant tout le confort qu’il me faut : un grand lit, une salle de bain, et un énorme ventilateur au plafond. Bien entendu, si on regarde dans les coins, il y a deux où trois choses à redire. Par exemple, lorsque je me suis placé devant la glace de la salle de bain, j’ai compris tout de suite qu’elle était prévue à l’origine pour une clientèle locale car, tout ce que je pouvais voir de mon visage, c’était le menton. Il n’y a pas d’eau chaude, ce qui ferait hurler le touriste moyen mais, franchement, c’est ici un luxe tout à fait inutile.

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Ma Guest House à Negombo. Rien à voir avec un hôtel.

La porte de ma chambre donne sur la terrasse et cette dernière, directement sur le sable. En prime, les voyageurs sont ici. Je fais figure de vieillard parmi eux, vu que la moyenne d’âge ne doit pas dépasser 25 ans. Deux filles voyagent seules, mais comme j’envisage de partir d’ici deux jours, j’ai laissé flotter les rubans.

Après mon installation, c’était l’heure de manger, mais je n’avais pas faim à cause du décalage. J’ai donc décidé de faire une sieste pour récupérer. Ensuite je suis allé faire un tour. J’ai bu un jus d’ananas frais dans un estanquet tout en lorgnant le thermomètre accroché au mur : 31° à cinq heure de l’après-midi, et un taux d’humidité qui devait crever le plafond. Te voilà dans un pays à cinq douches par jour, j’ai pensé.

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La plage s'anime le soir

Sur le soir, j’ai passé mon maillot et je suis allé me tremper. Des jeunes faisaient une partie de foot avec beaucoup de sérieux. J’ai remarqué qu’ils étaient disciplinés et bien organisés. Certains d’entre eux maniaient la balle vraiment bien. Beaucoup de gens les regardaient où passaient un moment à la fraîche. L’ambiance était reposante. J’ai aperçu la voyageuse Anglaise, solitaire, qui regardait la mer assise sur le sable. Je ne suis pas allé lui parler. J’ai tourné les talons pour aller manger mon premier curry de crevettes. 

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Partie de foot au crépuscule

 

 

 

Mercredi 8 février

 

Moi qui suis lève tôt, j’ai émergé ce matin à 9 h. J’ai donc récupéré deux heures de décalages. Je suppose que demain j’aurai effacé les 2h30 restante et que je serais à jour de cet inconvénient.

Avant de partir pour voir à quoi ressemblait le village, j’ai voulu recharger la batterie de mon appareil photo, mais la prise était trop large. J’ai dû faire intervenir le système D dont vous pouvez voir le résultat ci-dessous.

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Occupée par les Portugais, puis les Hollandais et ensuite les Anglais, Negombo a été très marquée par l’influence de la religions catholique. Aujourd’hui encore, le Christ fait bon ménage avec Bouddha. Au hasard de ma promenade, je suis passé devant de nombreuses églises, mais un seul temple Bouddhiste. Il y a des représentations de saints à tous les coins de rues. Ils sont peints de couleurs criardes et placés dans des maisonnettes entourées de grilles.

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Un truc qu'on s'attendrait à trouver plutôt au Guatémala.

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Autour de la cour de cette église sont exposées des représentation des 12 stations du chemin de Croix.

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Remarquez les régimes de bananes pendus à la porte de ce temple.

Sur le coup de 11h, j’ai pris un en-cas dans un boui-boui. Un gros rouleau de pâte frit, farci de choses indéfinissables, et une petite assiette de foies de volaille macérés au curry et offerte par le patron. Ce n’était pas mauvais du tout. Ensuite j’ai acheté des bananes, jetant mon dévolu sur une variété courte, joufflue et qui s’est avérée goûteuse. Rien à voir avec les bananes insipides d’Egypte.

Baguenaudant dans les rues encombrées de populasse, je me suis fait la réflexion que tous les habitants devaient être dehors. Si on se ballade dans les rues d’un village de France de même grandeur, on se demande, en général, où sont les habitants. La différence s’appelle la vie.

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Panneau directionnel d'évacuation en cas de Tsunami

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Le gros du Tsunami a frappé plus au sud, mais les tombes de ce cimetière ont été endomagées. Depuis on a mis des tas de sable.


Comme toujours, je me suis laissé entraîner assez loin et j’ai pris un Tuk Tuk pour rentrer. Au moment de payer, le type me demande si je voyage seul. Je réponds que oui. « Good for you, il me fait, I have a very special massage for you ! Only 2000 Roupies ! » Spécial comment, je lui fait, pour rigoler. « Very spécial, my friend, young and very nice nude girl with a happy end ! » Young comment, je lui demande un peu inquiet et de plus en plus curieux. « 22 years old, you can touch, but no body body. » Ha ! tu me rassures, mais 2000 roupettes ? T’exagères pas un peu, je lui fait, ta manuelle, elle plus chère qu’une call girl du Crillon ! « No, no ! Spécial price for you ! » Ouai, c’est ça, je crois que je vais passer mon tour pour aujourd’hui, je lui ai dit en mettant les voiles. Avec ces types, il faut couper court et tourner les dos, sinon, il commence à ratiociner et ça n’en finit plus. Je pouvais presque croire que je m’étais trompé d’avion, que j’étais en Thaïlande où un pays du genre. Ça leur ne suffisait peut-être pas, le curry, comme spécialité  locale, allez savoir. Cela dit, pour tester celle-là, je crois que je vais attendre d’être un peu plus désespéré.

Pour finir dignement la journée, j’ai décidé de me payer le meilleur restaurant. Mon guide en parlait comme d’une merveille et je ne voulais pas mourir idiot. De plus, comme je m’en sors bien sur le logement, je peux me lâcher sur la bouffe, non ?

Je me suis donc pointé au Lord’s, tenu par un Anglais, ça va de soi : salle en plein air délicieusement décorée, service stylé, et un curry de crabe à tomber. Pas de vin, mais une bonne bière disponible seulement en 66 cl et pour finir un alcool local offert par la maison. Petite touche d’anachronisme, j’ai mangé accompagné par un trio mexicain qui jouait avec discrétion une musique toute indiquée pour un restaurant. Ah ! j’allais oublier, l’adition : 11 Euros !

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En voyage, les asiatiques ont l'habitude de prendre tous leurs repas en photos. Je vais suivre le bon exemple, mais seulement pour ceux qui en valent la peine.

 

 

 

Jeudi 9 février

 

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Le bus de Kandy n’est pas, à proprement parler, une affaire. Sur le marché de l’occasion, il vaudrait que dalle. Il roulait néanmoins comme il pouvait, soit exactement 22,5 Km/h de moyenne sur les 90 Km d’une route pourtant convenable. Il faut cependant être honnête, il n’était pas le seul responsable de cette lente procession. (Je sais, c’est un pléonasme, mais je tiens à marquer le coup.) Tous les camions, bus et autres Rickshaws de l’île s’étaient donnés rendez vous, ce matin, pour une parade dont je me serais bien passé. Quatre heures par 35°, c’est une éternité, et comme disait ce cher Woody : « L’éternité, c’est long, surtout sur la fin ! » D’autant plus que le chauffeur semblait encore plus pressé d’arriver que moi. Ne pouvant appuyer plus sur le champignon de son haridelle mécanique, il essayait de compenser en doublant dans les virages sans visibilité, rassuré sans doute par un puissant klaxon qu’il utilisait sans regarder à la dépense. Pour faire bon poids, j’ai pris le coup de soleil du camionneur pour cause de bras trop longtemps pendu à la fenêtre. Il faut bien aller chercher l’air où il est ! Il y a eu tout de même une récompense au bout de ce calvaire, le paysage à partir de Kegalle a fait tout ce qu’il a pu pour se rendre intéressant.

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Les images de la Déesse clignotent comme un arbre de Noël.

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Kandy est la deuxième ville du pays - 112 000 habitants tout de même - mais comme il n’y a pas de hauts immeubles, on n’a pas l’impression que c’est une grande ville. Plaque tournante du centre de l’île, elle ne se trouve qu’à 500 m d’altitude, mais le massif montagneux culmine à 2524 mètres.

À la descente du bus, j’ai fait quelques pas avec mon sac pour vérifier que mes jambes fonctionnaient encore. Puis j’ai balancé ce dernier à l’arrière d’un Tuk Tuk et j’ai donné l’adresse de la Guest House que j’avais choisie. Pour le coup, celle-ci en est une vraie, à savoir que je loge chez l’habitant. Tout est d’une propreté impeccable ; ma chambre est grande et bien meublée, le lit est immense et la salle de bain est à l’unisson. Il y a même deux serviettes de toilette, ce qui n’est pas si courant. La maison se trouve sur une colline, à mi-pente d’une petite route très raide, bien obligée, vu qu’en dehors du centre ville, il n’y a pas de terrain plat.

La ville est charmante. Le lac donne un petit air Suisse au paysage, d’autant plus que, à mon grand étonnement, tout est parfaitement propre et bien entretenu : pas un papier au sol, pas de sacs plastique ni même de mégot, pas de poubelle qui traîne. C’est un grand changement après l’Egypte. Les gens sont souriants et serviables, à tel point que je me dis qu’il y a nécessairement quelque chose qui cloche, mais sans pouvoir trouver quoi pour le moment.

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Première averse, mais d'après les gens, ce n'est pas la saison des pluies.

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Ce soir, j’ai mangé à la table d’hôte avec les autres voyageurs : trois couples de nationalité  Anglaise, Australienne et Danoise. J’ai principalement fait la conversation avec le Danois car, comme il me l’a si bien dit, les Anglophones de naissance ne parlent jamais une autre langue que la leur. Ils ne réalisent donc pas qu’ils doivent faire un effort pour parler un peu plus lentement et sans argot afin d’être compris des pauvres idiots de notre espèce. Certains y arrivent mais, malheureusement, ce n’était pas le cas de ces Australiens au langage totalement incompréhensible à moins d’être parfaitement bilingue. C’est la raison pour laquelle les voyageurs non anglophones aiment bien parler Anglais entre eux. Ils savent comment procéder et se comprennent parfaitement. Cela dit, le curry était excellent. Pour ceux qui l’ignorent, le vrai curry se compose d’un plat de viande ou de poisson, d’un plat de riz, et de plusieurs plats de légumes épicés d’accompagnement. Sans oublier les sauces et les chutneys. On se sert un peu de tout, et on mélange à son goût dans son assiette. Le natif fait des boulettes du bout des doigts et mange avec sa main droite, mais il faut un peu de pratique. Je me contente encore d’une fourchette.

 

 

 

Vendredi 10 février

J’ai été réveillé à cinq heure du matin par les oiseaux qui piaillaient comme des fous dans les arbres du jardin. À tout prendre, c’est tout de même plus agréable que le Muezzin. Je dors peu en ce moment car je me couche aussi très tard et je commence à fatiguer. Il va bien falloir que je me fasse une nuit complète à un moment ou à un autre.

J’ai pris mon petit-déjeuner à la table commune en compagnie d’un Chinois. Il m’a demandé si je ne voulais pas aller à Jaffna avec lui, car il avait un peu la trouille d’y aller tout seul. Malheureusement pour lui, j’ai prévu d’y aller vers la fin de mon voyage. Jaffna se trouve à la pointe Nord de l’île. C’est une région où les touristes ne vont plus depuis longtemps car elle était le centre de la résistance Tamoul pendant la guerre civile qui vient, « officiellement », juste de se terminer. Le gouvernement y a récemment autorisé les déplacements, mais certaines sources racontent qu’il y a encore du danger et des enlèvements. Cependant, notre hôte nous a affirmé que nous y serions bien accueillis. Nous verrons bien.

Pendant que je dégustais ma papaye, j’entendais des cris d’enfants venant de l’école primaire, un peu plus bas. Or, il n’était pas sept heure du matin. J’ai questionné notre hôte et il s’avère que les enfants des campagnes arrivent à l’école à six heure. D’après lui, les énormes embouteillages empêchent les parents de les amener plus tard. Les cours commencent ensuite à 7 h et se terminent à 13h30.

Aujourd’hui, j’ai fait une longue marche autour du lac et sur les collines environnantes. Le lac est bordé de différentes espèces d’arbres qui arborent obligeamment leur nom sur une discrète pancarte clouée. Mais la flore n’est pas son seul intérêt car les créatures qui le peuple sont pour le moins surprenantes. Je vous laisse juge, sachant que je n’ai pu faire d’image des serpents d’eau car ils sont trop rapides pour mes réflexes. Quand aux tortues, elles étaient trop loin.

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Ils appellent ça des lézards d'eau. Ils dépassent 1m50 et sont assez rapides puisqu'ils bouffent, entre autre, des oiseaux. Tu m'étonnes que personne ne se baigne...

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Beaucoups d'oiseaux aussi.

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Le lac fut crée par le dernier roi du Sri Lanka en 1807. Cette île servait de harem. Elles devaient être un peu à l'étroit, les concubines.

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Ce type ramasse à la main les feuilles tombées dans l'eau. Un cantonnier aquatique, quoi !

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Cette procession sortait du Temple de la Dent, juste comme je passais devant. Ce Temple est ainsi appelé parce qu'il renferme la relique des reliques : une dent de Bouddha. Je compte visiter ce Temple lors de mon prochain passage à Kandy. 


En remontant vers ma pension, j’ai été hélé par une Allemande qui buvait un thé à une terrasse. Elle cherchait une chambre dans le coin, mais tout était complet. Elle m’a offert un verre et, tout en discutant, je me suis demandé si elle n’attendait pas que je l’invite à partager la mienne. Elle était mince, bien mise, mais tout de même un peu tapée. Dommage. 

 

 

 

Samedi 11 février

J’ai consacré ma journée à une longue marche dans la forêt d’Udawattakelle. Cette forêt est située sur les hauteurs de Kandy. Mon guide déconseille fortement de s’y aventurer seul, mais chacun sait que les guides appliquent, au même titre que les gouvernements occidentaux, le sacro-saint principe de précaution. J’ai passé cinq heures dans les bois sans trop m’en rendre compte, intéressé que j’étais par l’observation des singes sauvages. Au hasard de ma marche, au aguets du moindre bruit autre que les cris incessants des oiseaux, j’ai découvert trois bandes de ces petits singes dont je n’ai trouvé le nom nulle part. Il est difficile de s’arracher au spectacle quand on regarde vivre des singes. Ils sont toujours en activité, soit pour chercher de la nourriture, soit pour jouer où se chamailler. La forêt, en elle-même, n’est rien d’autre qu’une forêt tropicale classique : végétation luxuriante, fougères et yuccas géants, arbres énormes et de belles lianes que n’aurait pas reniées Tarzan. Les oiseaux, eux, s’ils font beaucoup de bruit, sont invisibles. Ce n’est pourtant pas faute d’avoir essayé de les voir.

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Les lianes existent vraiment.

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Ces bambous font 60 cm de diamètre. J'ai mesuré !

J’ai remarqué que les bandes de singes se trouvent près des arbres morts où des arbres qui portent des fruits. Des branches mortes, ils enlèvent l’écorce pour trouver des larves où d’autres trucs non identifiés. J’ai dû passer un quart d’heure à regarder comment un singe arrivait à enlever l’écorce d’un bout de branche : fascinant !

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Évidemment, j’ai fait un tas de photos que je ne peux poster pour cause de lenteur exaspérante d’Internet. Mais en voici tout de même quelques-unes. J’ai découvert également il y a peu - ne vous marrer pas - que mon appareil photo pouvais faire des petites vidéo. Je vais essayer de les poster un de ces jours si j'arrive à comprendre comment on fait...

 


 

Je n’ai pu obtenir que trois nuit à ma Guest House. Des réservations étaient faites depuis longtemps. J’ai cherché quelque chose d’autre, mais n’ai rien trouvé de libre qui me convienne. J’ai donc décidé de partir demain matin pour Haputale. Si j’ai le temps, je reviendrai à Kandy à un autre moment pour explorer la région un petit peu plus.

Je suis allé à la gare en milieu d’après-midi pour acheter mon billet de train, mais il n’y avait plus de billets de première. Je voyagerai en seconde classe, ce qui promet d’être intéressant.

 

 

INTERLUDE

 

 

En application du principe selon lequel, quand on cherche, on finit toujours par trouver, j’ai réussi à comprendre comment poster mes deux petites vidéo sur le blog. (Voir au-dessus).

Voici également trois images intéressantes.

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Ces fruits sont énormes, les singes ne sont pas loin. Aucune idée de ce que ça peut être. Cela ressemble à des fruits à pain.

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Avant

En regardant où je mettais les pieds - il vaut mieux, dans la forêt - je suis tombé sur cette petite fougère pas très commune. Lorsque nous étions enfants, aux Antilles, nous les appelions "Marie, caches ta culotte". Pour la raison amusante que, lorsqu'on les effleure du doigt, elles referment leurs feuilles.

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Après

 

 

Dimanche 12 février


Carte Sri Lanka 3

Il faut croire que mon cerveau appréhendait inconsciemment le voyage car je me suis réveillé, ce matin, plus tard que d’habitude. J’ai donc été à la bourre une nouvelle fois. 45 minutes pour prendre ma douche, faire mon sac, avaler mon petit-déjeuner, payer ma chambre, dire au revoir, trouver un Tuk Tuk et arriver à la gare en avance, je ne veux pas me jeter des fleurs, mais, parfois, je suis vraiment rapide.

Le voyage vers Haputale nécessite un changement de train après 20 minutes de trajet. Les billets de secondes classes étant sans réservation, lorsque j’ai débarqué sur le quai de la gare de transit noire de monde, j’ai compris que ça allait être compliqué pour trouver une place. Je me suis donc convoqué, comme à mon habitude, pour cinq minutes de réflexion. J’allais éviter de me battre pour une place aléatoire et essayer de trouver un coin où je pourrais au moins poser le cul sur mon sac.  Dans cette perspective, le wagon-restaurant me paraissait tout indiqué. Lorsque le train est arrivé, j’ai laissé les gens se présenter en masse devant les portes de seconde et j’ai marché le long du train, qui, à vrai dire, n’était pas bien long, pour trouver mon petit coin.

Le wagon n’avait de restaurant que le nom, même si, effectivement, on y vendait de la bouffe.

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Le wagon-restaurant

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Ma place assise

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Routardes Russes, à ne pas confondre avec

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Russes en vacances.

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Nous sommes peinards au début.

J’ai posé mon sac près d’une fenêtre, la protection sur le sol. Une fois assis, ce n’était pas trop inconfortable. Je n’étais pas seul au restaurant, deux filles et un autre couple avaient eu la même idée que moi. Comme quoi, il ne faut jamais croire que ses idées sont originales. Il y a toujours quelqu’un qui y a pensé avant vous. Par un hasard extraordinaire, tous les quatre étaient Russe. Les deux filles étaient originaires de Saint-Pétersbourg, et le couple de Biélorussie. Ils s’étaient rencontrés sur le quai de la gare. Après un moment, je me suis aperçu que l’une des filles me dévisageait plus que de raison, mais ce n’était pas ce que je croyais. « Pardonnez-moi, elle a fait, mais vous ressemblez drôlement à Ben Gazara ! » Devant mon air ahuri, elle a ajouté : « mais si, vous savez bien, l’acteur ! Il a joué dans des films de Copola ! » Dans ma jeunesse, quelques copines m’avaient affirmé que je ressemblais à Samy Frey, mais Ben Gazara ? » D’abord, je ne voyais pas du tout, quelle tête il avait et, ce soir, je l’ai cherché sur Internet. J’ai mis sa photo sur mon écran et je me suis regardé dans la glace. Ok, c’est vrai, il y a comme un air. Cette fille était vraiment physionomiste.

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Plantations de thé


La distance entre Kandy et Haputale est d’environ 130 Km. Nous avons parcouru la distance en 7 heures avec des pointes à 30 Km/h. Des heures qui, contrairement au train, ont filé à toute allure car, comme aux Galeries Lafayette, il se passait toujours quelque chose. Quand ce n’était pas à l’extérieur avec des paysages grandioses, c’était à l’intérieur avec, à chaque arrêt, de plus en plus de monde et un incessant va et vient. Pour être pittoresque, c’était pittoresque.

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Photo prise bras tendu, au jugé.

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Notre petit coin tranquille ne l'est plus...

Au bout de 3 heures de route, il a été impossible de rester plus longtemps assit sur mon sac. Il y avait des enfants et je leur ai laissé la place. Je me suis dit alors que ce que les « Sri » pouvaient faire, je pouvais le faire aussi. Je me suis donc assis à la portière dès qu’elle s’est libérée, et là, mes semelles posées sur le marchepied, j’ai passé le reste du voyage aux premières loges. Je n’aurai pas échangé ma place pour le Wagon panoramique qu’il faut réserver, paraît-il, longtemps à l’avance.

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Ma place assise aux premières loges.


 

Après les émotions du voyages, j'étais tout de même un peu crevé. Ce genre de train est instable et bruyant, sans compter qu’il envoie la sirène avant tous les virages pour prévenir les personnes qui marchent sur la voie. C’est, semble-t-il, une façon plus pratique de se déplacer pour les habitants des campagnes.

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21 janvier 2012 6 21 /01 /janvier /2012 20:19

 

Vendredi 20 janvier

 

Journée de voyage classique. Je n’ai plus aucun stress depuis un moment pour mes déplacements. Je commence à être rodé. Lorsqu’on sait comment tout cela fonctionne, c’est évidemment beaucoup plus simple. Pour les taxis idem. Ne jamais accepter l’offre de ceux qui vous attendent à la sortie. Ils n’ont jamais de taximètre, évidemment. Comment ils feraient pour entuber les gens, sinon. Les propositions pour se rendre à mon hôtel allaient de 30 à 40 Livres, n’importe quoi ! J’ai marché 100 mètres, arrêté un taxi avec taximètre et j’en ai eu pour 5 Livres. CQFD !

Pas grand-chose à dire de plus, sauf que j’ai eu la surprise de ne trouver personne dans mon wagon de première au départ d’Alexandrie. Je me disais que pour une ville de huit millions d’habitants, c’était louche. Mais il y a deux gares. J’étais seul à partir de la gare du centre ville, mais quelques personnes sont montées à la gare de banlieue. Ensuite, aucun arrêt jusqu’au Caire où j’ai trouvé un temps beaucoup plus doux. J’ai enlevé la polaire, c’est dire…

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Pas grand monde sur le quai

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Mon wagon

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Première classe

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Dimanche 22 janvier

 

Ceux qui ne sont jamais venu au Caire ne connaîtront jamais le sens exact des mots souk et capharnaüm. Toutes les photos du monde ne pourront jamais décrire la pagaille indescriptible qui règne dans cette ville et plus particulièrement dans les quartiers populaires. Ce qui manque sur les photos, c’est le bruit et la fureur. Mais si le roman de Faulkner cible les désordres de l’esprit, il s’agit ici de désordre tout court.

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Pour mon dernier week-end, j’ai décidé de faire une descente au plus profond de la ville. Entre samedi et dimanche, j’aurai marché huit heures et parcouru une infinité de rues et de ruelles, de places et de marchés. Je suis parti sans plan. À quoi bon, les rues de ces quartiers n’ont pas de plaques. Pour me repérer, je me suis fié à mon instinct et à ma connaissance relative des endroits stratégiques de la ville. Il faut croire que je ne m’en suis pas trop mal sorti puisque je suis là, à écrire ce dernier compte-rendu de ce voyage.

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Porte monumentale de la vieille cité

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Shisha en attendant le client

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Les fantômes noirs

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Hier, je m’étais donné pour but de visiter le dernier artisan relieur du Caire.  Je l’ai trouvé dans une ruelle derrière la mosquée El Azhar. Il réalise entre autres des cahiers et carnets de notes magnifiquement reliés à l’ancienne avec une couverture en cuir et dorés à la feuille d’or. J’ai demandé à visiter le petit atelier de dorure et fait  spécialement graver et dorer une inscription sur les deux petits carnets que j’ai achetés.

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Dans ce pays, on croise tous les jours une multitude de porteurs. En général, il s’agit juste d’un travail harassant qui fait peine à voir. Mais parmi eux se distingue une catégorie que je baptiserais « les acrobates de la boulange ». Il y a peu de boulangerie en ville. D’ailleurs, dans le quartier centre ville de mon hôtel, il n’y en a aucune ! Ces types transportent donc le pain des ateliers aux endroits qui en font la demande : vendeurs de rues, restaurants etc… Le truc c’est qu’ils le font à vélo au milieu de la circulation qui, je le répète, est démente. Je suis resté scotché plus d’une fois à les regarder se faufiler dans le trafic avec ce truc sur la tête tout en conduisant d’une seule main. Plus qu’une grande description, jetez un coup d’œil aux photos ci-dessous.

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Sans commentaire !


Voilà, ce voyage est terminé. Je prends l’avion demain matin pour passer quelques jours en France. Je m’envolerai ensuite vers le Sri Lanka aux alentours du 5 février. Ceux qui ont pris plaisir à me suivre peuvent surveiller mon blog à partir de cette date pour d’autres aventures.

 

Pour en finir sur une note sympa, je ne résiste pas au plaisir de poster cette image craquante. 

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18 janvier 2012 3 18 /01 /janvier /2012 17:04

 

Mardi 17 janvier 

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Me voici de retour en Alexandrie. Je voulais y revenir pour voir deux où trois trucs que j’avais manqué et aussi pour me rendre à Aboukir et Rosette. Bien que Rosette, cela semble mal embarqué. En effet, durant tout le trajet de mon bus, j’ai remarqué qu’il avait dû énormément pleuvoir ces derniers jours. Les champs étaient inondés et de nombreuses maisons avaient de l’eau sur le seuil. Les gens marchaient dans une boue épaisse. Cela n’avait pas l’air très agréable. Or, mon guide prévient : « Très peu de touristes viennent jusqu’ici, mais ne programmez pas cette visite pendant une période de pluie, sous peine de patauger dans la gadoue. » Je vais attendre demain, bien que ça ne sente pas très bon. Le ciel est chargé de nuages et, à mon humble avis, c’est du peu au jus pour que ça retombe. Dans le pire des cas, j’irai tout de même à Aboukir qui n’est qu’à 25 kilomètres d’Alexandrie. Il y a, paraît-il, un restaurant de fruits de mer à ne pas louper. Ce sera tant pis pour l’embouchure du Nil que je voulais voir à Rosette, parce que, la pierre hein, il y a belle lurette qu’elle n’est plus là.

J’ai une chambre sympa au sixième étage, pile au centre de la baie. La vue n’est pas dégueu, ça console un petit peu. 

 

 

 

Mercredi 18 janvier

Comme prévu, les éléments se sont déchaînés aujourd’hui. Je n’ai eu d’autres ressources que de me planquer à la Bibliotheca Alexandrina. Par chance, cette bibliothèque est immense et recèle en son sein plusieurs musées et expositions. Ce qui fait que je n’ai pas vu le temps passer.

J’ai déjà parlé de l’architecture futuriste extérieure lors de mon premier passage ici, mais l’intérieur n’est pas en reste. La première impression après quelques minutes, c’est que nous avons probablement ici le lieu le plus propre de toute l’Egypte. Il n’y a pas le moindre papier au sol, pas le moindre grain de poussière. C’est lumineux, sobrement fonctionnel et aéré. Les matériaux utilisés font très classe : sols en parquets, granit noir, cuivre oxydé. On choisirait bien les mêmes pour construire sa maison.

La salle de lecture prévue pour 2 000 personnes est la plus grande du monde. Chaque poste de lecture dispose d’un ordinateur. C’est assez impressionnant. Cette salle s’organise sur 7 étages en escalier recélant chacun un grand thème d’étude. Au total, la salle peut contenir cinq millions de livres. J’ai jeté un œil sur les rayons et je me suis aperçu qu’il y en a dans toutes les langues, mais la majorité est en anglais et en français.

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Cette salle se trouve sous la coupole en forme de disque solaire inclinée. Le sous-sol est occupé par les musées et les expositions. Je me suis baladé dans différentes salles  qui présentent des expositions de peintures, de céramiques, de sculptures modernes et une très intéressante sur des livres d’art venant du monde entier et ayant Alexandrie pour thème. Ensuite, je me suis contenté de visiter le musée archéologique et le musée Sadate. Le musée archéologique présente les découvertes récentes et assez exceptionnelles faites lors des fouilles sous-marines en baie d’Aboukir. L’état de conservation des statues, des bijoux et autres objets est assez remarquable. On peut y voir aussi de grandes mosaïques retrouvées lors des excavations nécessaires à la construction de l’actuelle bibliothèque. Ces mosaïques recouvraient le sol de la grande bibliothèque détruite. Elles sont d’une finesse inouïe. L’une d’entre elles représente, fait rarissime, un très beau chien en son centre. L’explication serait qu’au moment de la construction de la bibliothèque, une pièce de théâtre très à la mode avait un chien comme personnage principal. Un peu émouvant également, des fragments de papyrus des éditions originales de l’Enéide et d’Oreste, la pièce de Sophocle.

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Le disque solaire incliné sous la pluie. Vue du premier sous-sol.

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Le musée Sadate est un panégyrique à la gloire du président assassiné en 1981. On y voit tous les objets et vêtements lui ayant appartenu, mêmes deux allumettes usagées ayant servi à allumer sa pipe ! Ce qui a attiré mon attention, c’est la radio favorite du président, une Satellit 2000, sans doute la plus grosse radio portable de l’époque. (Mon frère comprendra pourquoi, lui qui en a hérité d’une et qui l’écoute encore). En bonne place, une grande TV diffuse en boucle le film de l’attaque de la tribune présidentielle par les militaires rebelles.

Lorsque j’en ai eu plein les pattes, il a bien fallu que je songe à revenir à l’hôtel. Dehors c’était la bourrasque. Un bon trente nœuds de vent avec la pluie en prime. Déjà que la circulation est infernale en temps normal, vous imaginez avec la flotte. Tous les minibus et les taxis étaient pleins. Sur l’avenue, des tas de gens se ruaient sur les rares encore disponibles. Si vous voulez vous faire embarquer dans ces conditions sans parler un mot d’arabe, bonne chance. Je me suis vite rendu compte que c’était peine perdu tant les Egyptiens sont goujats et malpolis dans ces conditions. La notion de file leur est étrangère, et je pense qu’ils auraient bousculé père et mère pour avoir une place, alors un étranger, vous pensez.

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Petite halte sous une tente.

Je me suis donc résigné à rentrer à pied : vingt minutes de marches à slalomer entre les flaques, à éviter les plaques de boue, à raser les murs pour passer sous les tentes, avec quelques fois un arrêt quand ça tombait trop fort. Pour une première, j’étais servi. Je suis arrivé à l’hôtel bien comme il faut, merci. Pour couronner le tout, la porte à glissière de la véranda de ma chambre ferme mal, comme toujours. (Il faudrait faire tout un article sur les portes et fenêtres en Egypte, parce que c’est croquignolet !) Il y a un jour de 5 mm du sol au plafond, ce qui fait que le vent, qui arrive plein Nord dans l’axe, s’y engouffre en produisant un grondement qui laisse penser qu’une tornade est en approche finale. Bien évidemment, ici, il n’y a pas de chauffage. J’écris, assis dans le lit, avec mes chaussettes et quatre épaisseurs de vêtements sur le dos. Je vais bientôt regretter les froids hivers de mon pays. 

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Alexandrie sous la pluie. Vue de ma véranda.

 

 

 

Jeudi 19 janvier

Il y avait un vent de tous les diables aujourd’hui. En plus, il était très froid. Le vent polaire arrive-t-il jusqu’ici ? Je suis resté au chaud tout relatif de ma chambre jusqu’à dix heure. Ensuite je suis allé à la gare acheter mon billet de train pour demain. Cela tombait bien, le minibus pour Aboukir partait à proximité. Les minibus, l’ai-je déjà souligné, sont vraiment très pratiques. Il y en a en permanence dans toutes les directions. Bien sûr, ils ne partent que quand ils sont pleins, mais pour une mégapole de 8 millions d’habitants comme Alexandrie, c’est dix minutes d’attente maxi. Le plus difficile, c’est de trouver le point de départ, ensuite ça va tout seul. Une fois sur place, on se trouve devant une multitude de véhicules. Pour savoir lequel prendre, il suffit de tendre l’oreille. Les chauffeurs braillent le nom de leur destination toute les 30 secondes. Dans mon cas, il fallait bien faire attention, parce que Aboukir s’écrit Abou qir en arabe et se prononce Abouhi. Avec l’accent en plus, ce n’est pas évident.

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Minibus, vue de ma place privilégiée.


Il rentre 14 voyageur dans un minibus, deux à côté du chauffeur et quatre rangées de trois. Depuis le temps, j’ai repéré la meilleure place. Il s’agit de celle du fond à droite, pour la bonne raison que c’est la seule où l’on peut allonger un peu les jambes sous le siège de devant puisqu’il s’agit d’un strapontin. Si vous choisissez une autre place, vous faites le voyage avec les genoux sous le menton. Les Egyptiens semblent s’en accommoder, mais pour mézigue, au bout d’un moment, c’est l’enquilosage assuré. (Je sais, ce n’est pas français, je viens d’inventer le mot).

Autre avantage, le tarif : deux livres pour Aboukir qui se trouve à presque 30 kilomètres, soit 25 cents d’Euro ! Pour payer, c’est simple. Lorsque le minibus est parti, un voyageur du fond collecte l’argent de la rangée et le fait passer à la rangée de devant et ainsi de suite jusqu’au chauffeur. S’il y a de la monnaie à rendre, disons qu’il arrive 35 Livres à l’avant au lieu de 28, l’argent prend le chemin inverse et est redistribué à qui de droit. Un système imparable. Tous ces minibus sont privés. Leur état va de assez bon à lamentable. Je doute qu’ils soient assurés, ce qui est assez inquiétant vu la conduite kamikaze de tous ces chauffeurs. Il faut les comprendre. Plus ils font de rotations, plus ils gagnent des sous. Ce qui fait que ma place à l’arrière à aussi l’avantage de garer mes miches en cas de choc frontal.

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Ce n'est pas terrible, hein !


Aboukir, je vais passer vite fait. Inutile de tirer sur l’ambulance. En revanche la baie est d’une richesse archéologique incroyable. On y a retrouvé récemment les vestiges de Thônis-Héracléion, riche cité portuaire de l’époque pharaonique citée dans les textes anciens et, cerise sur le gâteau, non loin en mer, ceux de Canope, considéré comme la ville de débauche de l’Antiquité. Par un hasard extraordinaire, la même équipe de plongeurs a retrouvé les épaves des bateaux de Napoléon coulés par Nelson lors de la bataille d’Aboukir. Pour ceux que ça intéresse, il y a plein de sites sur Internet relatant ces découvertes de l’archéologue Français Franck Goddio.

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Baie d'Aboukir

Le restaurant Zéphyrion était ouvert, comme s’il s’était attendu à ma venue.  Probablement, avait-il eut vent de mon intention d’y venir manger, car j’étais le seul et unique client. Je suis allé choisir mes crevettes, mon calamar et mes crabes en cuisine et j’ai mangé en regardant la baie, imaginant que ces petits nuages, au loin, étaient la fumée des canons de Nelson. 

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Un grand moment de solitude

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14 janvier 2012 6 14 /01 /janvier /2012 20:05

 

J’ai reçu un mail du gentil couple de Belges qui m’accompagnait lors de la traversée du désert. Ils y joignaient un certain nombre de photos avec ma pomme en « Guest Star ». Comme je ne suis jamais sur mes photos, bien évidemment, je me suis dit qu’un peu de narcissisme ne ferait de mal à personne. Alors voici…

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12 janvier 2012 4 12 /01 /janvier /2012 20:31

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Mercredi 11 janvier

 

La route pour rejoindre Port Saïd, où je couche ce soir, n’a pas été un long fleuve tranquille. Pour commencer, j’ai dû me lever à cinq heure lundi matin pour quitter Sainte Catherine. Le bus partait à six heure et je n’avais pas envie de le rater. Évidemment, j’ai fait le pied de grue pendant une demi-heure devant la guitoune des tickets par un froid sibérien. Le préposé ne s’est pointé que cinq minutes avant le départ. Autant pour toi, pauvre cloche, me suis-je dit, on t’avait bien prévenu que le départ était à six heure pile ! Je suis monté dans ce bus avec du givre au bout du nez, pensant que j’allais me réchauffer, mais non, le bus n’était pas chauffé. Même le paysage magnifique du SinaÏ au soleil levant n’a pas réussi à me réchauffer. J’ai pensé que j’étais parti pour une bonne crève, mais ce soir tout semble aller bien.

Première étape, Suez. J’ai réalisé immédiatement que je me trouvais dans un monde ignoré des touristes car personne ne parlait un mot d’anglais. Pour commencer, j’ai pris un taxi depuis la gare des bus pour me rendre en ville. Enfin, j’ai tout de même attendu dix minutes que les chauffeurs des deux taxis disponibles aient fini de s’engueuler pour savoir lequel aurait l’immense privilège de me véhiculer. Ensuite, il a vite été évident que le chauffeur ne savait pas où il allait. J’ai fait une visite complète de la ville avec arrêt toute les trente secondes pour demander notre route. De toute évidence, personne n’avait jamais entendu parler de l’hôtel Star. Chemin faisant, je me suis rendu compte que Suez est une merde de ville complètement pourri, sale, vieille, et donc les rares bâtiments récents paraissent déjà avoir cinquante ans. Elle n’a même pas pour elle le charme du pittoresque. Un vrai mystère. De plus, elle semble occupée tellement il y a de militaires en armes, de chars et d’automitrailleuses.  Les bords du canal ne sont même plus accessibles. Il y a des grillages et des barbelés tout du long, sauf juste à l’entré sur la Mer Rouge où j’ai regardé passer quelques bateaux avec le canon d’une mitrailleuse dans mon dos. Les photos sont strictement interdites, ce qui est débile vu les moyens satellites dont dispose maintenant les éventuels agresseurs. Et donc, j’ai fait deux trois photos, rien que pour les faire chier, parce que, qui aurait envie de sortir son appareil dans un lieu pareil. De plus, à voir l’état et l’ancienneté de l’équipement de ces militaires, l’âge juvénile des soldats et leur désinvolture affichée, je doute fort qu’ils puissent opposer la moindre résistance à une attaque d’où qu’elle vienne, même de la principauté d’Andorre.

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Pas vu, pas pris...

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Entrée du canal Mer Rouge

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Pour couronner cette journée à oublier, mon hôtel ressemblait à un bouge des bas-fonds de Tanger. Je n’avais pas le choix, vu que, d’après mon guide, c’était encore le meilleur des trois hôtels de la ville dans mon budget. Ma chambre n’avait pas été nettoyée depuis Ferdinand de Lesseps, il y avait des mégots dans le cendrier, la lumière venait d’un néon qui pendait au bout de son fil et la fenêtre ne fermait pas. J’ai du sortir mon sac à viande inutilisé depuis longtemps pour dormir.

Les deux seuls bon points de la journée ont été le prix dérisoire des minibus pour se déplacer et mon repas poissons au restaurant.

Inutile de préciser que je me suis tiré vite fait ce matin. Mon intention était de m’arrêter à Ismaïlia. J’ai donc pris un minibus qui après une heure de trajet s’est révélé un cauchemar d’inconfort tellement j’avais les genoux coincés et mal aux fesses. J’ai enduré patiemment mon calvaire jusqu’à ce qu’on traverse Ismaïlia pour se rendre à la gare des bus et que, au vue du paysage,  je me rende compte que j’allais m’y faire chier autant qu’à Suez. À la gare des bus, je me suis donc assis sur un banc et convoqué pour une conférence au sommet. Le mieux est de continuer sur Port Saïd, me suis-je dit in petto. Tout ce que tu as à faire est de grimper dans ce taxi qui te tend les bras. De fait, une très vieille Peugeot 504 break se remplissait juste devant mon nez. J’avais entendu les gens qui s’installaient parler de Port Saïd. Il restait une place. C’était un appel où je n’y connaissais rien. Combien ? j’ai demandé, sans bouger de mon banc, et en frottant mes doigts dans un geste compréhensible par tous. Le type m’a montré trois pleines mains. 15 Livres ? C’est parti mon pote.

Question taxi, que je vous dise, j’ai l’impression de passer de Charybde en Sylla. Si j’avais osé, j’aurai fait une photo de l’équipage que nous formions à l’intérieur de cette épave. Devant, le chauffeur et deux gringalets. Rangée du milieu, moi, au centre, encadré par deux mastodontes qui m’enfonçaient les épaules. À l’arrière, une mère et ses quatre enfants. Évidemment, la fenêtre côté chauffeur ne fermait pas, ce qui fait que la température intérieure était assez fraîche. Cela n’aurait été rien si tous mes lascars ne s’étaient pas mis à discuter à battons rompus avec un niveau de décibels proche d’un avion au décollage. Les deux qui m’encadraient s’envoyaient des répartis au-dessus de ma tête comme au théâtre de guignol.

Franchement, en arrivant à Port Saïd, j’avais les oreilles qui sifflaient, et mon acouphène n’y était pour rien.

Heureusement, Port Saïd, j’ai accroché tout de suite. Pour ce que j’en ai vu, la ville me semble sympa. Mon hôtel serait parfait s’il y avait la wifi, mais, peu importe, le café juste en face en dispose. Il ne me reste plus qu’à trouver une laverie car je n’ai strictement plus rien de propre. Je ne voudrai tout de même pas tourner trop vite clochard.

 

 

 

Jeudi 12 janvier 

 

Le seul petit problème à Port Saïd, c’est qu’il va m’être difficile de faire des rencontres. Je n’ai croisé personne qui ressemble à un voyageur, ni à l’hôtel, ni au restaurant, ni au café, ni dans la rue. Les seules personnes qui m’ont adressé la parole aujourd’hui sont des gamins qui voulaient un dollar. De toute façon, personne ne semble parler un anglais suffisant pour une conversation.

Ce matin, j’ai trouvé un endroit où donner mon linge à laver. Ensuite je suis passé à la banque pour changer des sous pour la dernière fois. Je pense en avoir assez jusqu’à mon avion le 23.

Depuis que je suis arrivé, j’ai essayé quatre restaurants, dont deux très biens qui vont probablement devenir mes cantines pour mon séjour. Les prix sont sensiblement inférieurs à ce que j’avais l’habitude de payer, spécialement pour les plats de pâtes aux crevettes qui ne cessent de m’étonner tant ils sont copieux et savoureux. J’ai aussi trouvé une pâtisserie où les gâteaux sont extraordinaires. Je dois dire que j’en ai rarement mangé d’aussi bons, même en France. Ils font aussi les viennoiseries qui m’ont tout l’air d’être de la même eau, et que je me propose d’essayer demain pour mon petit-déjeuner.

La rue où se trouve mon hôtel est assez animée et très intéressante avec ses trottoirs en arcades. C’est là que se trouvent la plupart des bons cafés et restaurants de la ville. Elle ne se trouve qu’à une centaine de mètres du canal et le longe sur au moins un kilomètre.

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Après mon repas, j’ai marché sur la promenade qui longe le canal. La température était un petit peu fraîche, mais rien de bien terrible. Un temps de demi-saison comme on dit chez nous. J’aime les ports. Il y a toujours quelque chose à y voir. J’ai remarqué une navette de trois ferries qui traversent le canal. Les départs sont ainsi très rapprochés. Ils font traverser les voitures et les piétons gratuitement, ce que je ferai un jour prochain pour aller voir la statue de Lesseps. Le port de commerce est de toute évidence sur la rive Est du canal, rive où se trouvait le lieu de résidence des ingénieurs lors de la construction.

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Il n’y avait personne sur cette promenade. Les gens semblaient préférer la rue en contrebas pour se déplacer. Quelques immeubles ont été rénovés et sont assez représentatifs d’une gloire passée, mais il y a encore beaucoup de boulot de ce côté-là. Il n’y avait aucun bateau au moment de ma promenade. Le matin, ils remontent de la Mer Rouge et l’après-midi, c’est au tour des bateaux venant de la Méditerranée de descendre car ils ne peuvent pas se croiser. Ce qui fait qu’il y a un temps mort en milieu de journée. Ce qui est curieux, c’est que contrairement à Suez, il n’y a ici aucun militaire et aucune restriction concernant le canal. Doit-on comprendre que, stratégiquement, c’est à Suez que ça se passe ?

 

 

 

Vendredi 13 janvier 

 

Deux rues derrière mon hôtel commence le quartier Arabe où plus aucune voiture ne circule. Les rues sont envahies par les commerçants qui en ont pris possessions avec des étalages en tout genre. Il y en a même certaines que l’on ne peut emprunter qu’en se déchaussant, car les marchands de tapis y étalent leurs produits sur des dizaines de mètres. Le temps était menaçant en cette matinée. Quelques gouttes de pluie ont provoqué une petite panique car il faut du temps pour rentrer tout ce qui se trouve dehors. J’ai marché longtemps dans ce dédale, mais je ne risquai pas de me perdre car le plan de ville est un quadrillage dans le plus pur style américain. Dans mon dos le canal, à droite la mer et une large et longue plage très sale bordée d’une promenade un peu triste par ce temps d’hiver. J’ai débouché dans ce panorama plus de deux kilomètres à l’ouest du canal, juste au moment où la pluie s’est mise à tomber. Je me suis réfugié un bon moment sous un kiosque pas très étanche. C’était ma première pluie en 45 jours de voyage. Peut-être parce que nous étions le vendredi 13. J’en ai profité pour admirer la chenille de bateaux débouchant du canal et prenant le large.

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Immeuble typique du quartier

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Balcons de bois style New Orleans

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Portent-elles ce style de dessous ?

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On marche en chaussettes dans cette rue

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Camion de livraison

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Je ne sais pas pourquoi, j'ai le coeur qui se serre chaque fois que je vois ça...

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La plage

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La pluie arrive sur la promenade

Je comptais manger au restaurant Papaye et utiliser la wifi pour une urgence avec Valérie, mais je me suis finalement installé pour manger des Keftas dans un petit truc du bord de plage. De toute façon, même en me dépêchant, la pluie m’avait mis trop en retard. J’ai réglé ces petits problèmes, ce soir, sans trop de dommage.

Je ne l’ai pas encore signalé, mais, sur mon petit disque dur, j’ai en plus des vidéos quelques livres au format pdf.  Profitant du temps peu engageant de cet après-midi, j’ai ouvert la première page d’un de ces romans et j’ai bouquiné jusqu’au soir. Finalement, même si, bien sûr, je préfère le papier, on s’habitue assez vite à lire sur un ordinateur. Je voulais en faire l’essai et il est concluant pour un type en voyage. Il faudra donc que je m’en procure d’autre lors de mon court passage en France à la fin du mois. 

 

 

 

Samedi 14 janvier

Recherche Ferdinand désespérément.

Cela aurait pu être le titre d’un documentaire sur la façon dont j’ai occupé ma journée. Il faut savoir que la statue de Ferdinand de Lesseps se trouvait jadis au bout de la corniche qui longe le canal. Mais elle a été mise au rancart lors des évènements de 1956. D’après mes renseignements, elle se serait trouvé sur la rive Est du canal, dans le jardin d’une compagnie de Shipping soi-disant appelé « Montage ».

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Tout le monde monte sur le bac

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Au milieu du canal

 

Muni de ces vagues renseignements, j’ai pris le bac et je me suis rendu sur l’autre rive, dans le quartier appelé Port Fouad. Ce quartier a été construit au lendemain de la première guerre mondiale pour loger les ouvriers, les ingénieurs et les dirigeants du canal. Pour commencer, j’ai pris à droite du débarcadère. J’ai longé tous les bâtiments industriels sans trouver ce que je cherchais. Je suis donc partit plein sud pour traverser le quartier d’habitations des anciennes maisons d’ouvrier qui se prolonge par un grand marché à ciel ouvert. Je m’y suis baladé un peu, acheté trois bananes et puis j’ai traversé l’avenue vers ce qui devait être le quartier résidentiel des anciens dirigeants. Il y a là de très belles maisons de style colonial à demi masquées par des arbres. Ces maisons ont plus de 60 ans, mais gardent encore un certain charme. Elles m’ont rappelé le style de maison que l’on trouve à Key West. J’ai continué jusqu’à ce que je tombe au bord de l’eau, puis je suis revenu en longeant les hangars industriels. Je commençais à désespérer de trouver ma statue quand, en levant les yeux, j’ai vu un immense bâtiment entouré de hautes grilles dont le fronton s’ornait du mot « Montage ».

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Mosquée à deux minarets 

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Anciennes maisons des ouvriers du canal

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Marchande de poulets

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Anciennes maisons des dirigeants du canal

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Hé ben voilà, me suis-je dit, il n’y a plus qu’à rentrer et aller voir cette foutue statue.

Sauf que, comme j’avais traversé le hall et que, ni vu ni connu, je m’apprêtai à entrer dans la cour, j’ai entendu un ordre qui m’a cloué sur place. Je ne sais pas si vous avez déjà essayé de parler le langage des signes en arabe avec un garde patibulaire, mais moi oui. Cependant, dix minutes de gesticulations n’ont pas semblé émouvoir plus que ça mon interlocuteur. Il n’était pas question que je passe cette porte. En désespoir de cause, j’ai posé deux doigts sur mon épaule pour lui indiquer que je voulais voir un gradé. Et miracle, il a eu l’air de comprendre et m’a emmené dans un bureau où se prélassaient deux types devant un thé. J’ai recommencé ma salade avec un peu d’espoir, vu qu’un des types parlait trois mots d’anglais, mais il m’a fait comprendre qu’il était interdit de voir cette statue. Vous plaisantez, j’ai dit, ce n’est qu’une statue. Allez quoi, je n’ai pas fait tout ce chemin pour rien ? Il m’a demandé alors de le suivre pour aller voir le chef de la sécurité. Nous avons monté des marches et il a poussé la porte d’une grande pièce. Là, derrière un immense bureau, affalé dans un fauteuil rouge dans le plus pur style Le Caire nid d’espions, se tenait un énorme type en uniforme qu’il avait du chiper à Amin Dada. Ce qui était hallucinant, c’est qu’il n’y avait rien sur le bureau en dehors d’un énorme pistolet couleur argent. Houlà, ça commençait à déraper un peu mon histoire de statue. En plus, j’avais nettement l’impression de passer à la question. « Et pourquoi vous voulez la voir cette statue, hein ? » « Vous savez qu’il faut une autorisation de l’administration maritime pour la voir ? » « Vous avez rempli les papiers ? » « Montrez-moi votre passeport ! » Une autorisation du gouvernement, mais ils sont fous ! Mon passeport ! Dans un moment ils vont me passer les menottes ! Je me suis excusé et j’ai reculé jusqu’à la porte en faisant des courbettes, puis j’ai dit au revoir en jetant un dernier coup d’œil au flingue.

Maintenant, je me pose une question : ce genre de truc n’arrive-t-il qu’à moi ?

 

 

 

Lundi 16 janvier

 

Rien d’intéressant dimanche. J’ai consacré ma journée à faire des corrections sur mon dernier travail et à une longue promenade digestive sur la corniche. En revanche, aujourd’hui devrait être marqué d’une pierre blanche. Ce fût une des journées les plus amusantes de mon séjour. Puisque je suis dans le trip titres de films, disons que la matinée a été  très « Canonnière du Yang Tse », et l’après-midi, furieusement « Les bas-fonds », sauf qu’il n’y avait ni Steve Mac Queen ni Gabin.

J’avais décidé de consacrer ma journée à un petit voyage vers la ville de El-Matariyah, de l’autre côté du lac Manzaleh. Le seul problème c’était qu’il allait falloir jouer serré, car d’après mes renseignements, l’accès au bateau qui traverse le lac n’était pas autorisé par la police. Le seul moyen, m’avait-on dit, c’était de se faire accompagner par un local. Comme j’avais souvent eu de faux renseignements, j’ai décidé tout de même de tenter le coup. J’ai donc pris un taxi pour me rendre à l’embarcadère qui se trouve à l’extérieur de la ville. Et là, un énorme coup de pot. Le chauffeur était un jeune gars qui parlait un anglais compréhensible. Je lui ai expliqué mon problème et il m’a dit qu’il allait voir ce qu’il pouvait faire. Effectivement, arrivé sur place il y avait une grille avec un garde. Mon chauffeur a parlementé trente secondes avec le sbire et ce dernier nous a ouvert. « Je lui ai dit que vous étiez mon invité, m’a dit le chauffeur, vous pourrez prendre le bateau tout seul. » Je l’ai remercié et j’ai sorti mon fric pour le payer mais il n’en a pas voulu ! « Cadeau pour la conversation en anglais, m’a-t-il dit, je n’ai pas souvent l’occasion de pratiquer. » Comme quoi, on peut en rencontrer qui ne pensent pas qu’à l’argent.

Le lac Mazaleh est une extension du Delta du Nil. Une étendu d’eau assez vaste, avec très peu de fond, encombré d’une multitude d’îlots plantés de cannes et de spots d’algues marines agglomérées comme j’en ai vu dans la Mer des Sargasses. Le truc bizarre, c’est que la ville de destination de la navette n’était pas mentionnée sur ma carte. Comme je voulais tout de même vous montrer où cela se trouve, j’ai regardé hier soir sur Internet, et j’ai eu toutes les peines du monde à mettre le doigt sur une carte là mentionnant.

Carte Lac Manzaleh

J’ai fait beaucoup de photos aujourd’hui. À vrai dire, il était difficile de garder l’appareil dans la poche. J’avais espéré une petite cueillere de pittoresque, j’en ai eu une bonne louche. Et, contrairement à ce que disait Coluche, dans ce cas précis, c’était bien meilleur à la louche. Il y avait cependant un problème. Dès que je sortais l’appareil, les personnes à proximité voulaient toutes se faire photographier. Ces gens ne devaient pas souvent voir des touristes. Ils étaient complètement scotchés par la petite taille de mon Canon et se marraient comme des bossus quand je leur montrai le résultat. Certains m’en ont demandé le prix que j’ai écrit en arabe sur mon carnet, sauf que j’ai menti sur la vraie valeur de l’objet. Je ne me voyais pas leur expliquer que ce truc représentait trois mois de leur salaire.

Aujourd’hui, je vais changer de méthode. J’ai fait tellement de photos que je vais présenter ma journée sous la forme d’un reportage commenté. J’ajouterai une seule chose. J’ai eu à faire aux gens les plus gentils que j’ai rencontré au cours de ce voyage.

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L' embarcadère. Ce n'est pas tellement la forme qui m'a fait penser à la canonnière du Yang Tse, mais plutôt le bruit du moteur : un gros deux cylindres très lent qui faisait clong...clong ... clong..., exactement comme la canonnière.

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La moto est de marque chinoise

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Nous étions 4 passagers au départ en plus de l'équipage. Deux femmes qui n'ont pas bougé de la cabine, moi et ce type qui s'est tout de suite installé pour fabriquer ce filet très fin. Je l'ai bien observé. Un travail d'orfèvre.

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Il y a de nombreuses façons d'attraper le poisson du lac, celle-ci est la plus classique.

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Le Capitaine

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C'était assez souvent étroit pour passer

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À un moment, le bateau s'est arrêté sous un pont. Je me suis demandé pendant un moment pour quelle raison,

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jusqu'à ce que je vois ce type arriver dans le plus pur style gondole à Venise,

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et puis cet autre encore, juste après.

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Ils ont amarré leurs barques à l’arrière et ça nous a fait deux passager de plus qui ont voulu évidemment que je leur tire le portrait.

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Encore une barque qui s'amarre. À chaque fois, le bateau est obligé de ralentir pour permettre la manoeuvre.

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Je ne peux pas y échapper, c'est demandé si gentiment.

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Les cannes servent à construire les huttes, les palissades, les auvents et aussi des pièges en spirales très ingénieux pour attraper les poissons.

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Maisons de pêcheurs au milieu du lac.

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Celui-là a loupé son amarrage et souque ferme pour revenir dans la course.

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Le pont commence à être encombré.

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Les îlots d'herbes flottantes peuvent se traverser en barque.

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Il commence à y avoir du monde.

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Ce type est monté à bord avec un bidon plein de poissons. Je ne saurai vous décrire la technique de pèche employée, mais elle a l'air assez originale. Voyez ci-dessous.

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Vous avez remarqué les cagoules de catcheurs faites maison ?

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Voici l'instrument de pêche.

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les Mosquées sont vraiment partout !

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Et la prière également.

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Nous sommes arrivés avec une vingtaine de barques en remorque.

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Le port après 3h30 de traversée. Prix du voyage : 5 Livres, soit 60 cents d'Euro.

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Ce marché donne directement sur le quai.

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Les "Tuk Tuk", taxis locaux, sont d'origine chinoise. Il y en a des dizaines, tous de la même couleur, qui circulent dans cette petite ville. 

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À peine arrivé, j'ai rencontré ce type, militaire en permission qui parlait trois mots d'anglais. Il m'a guidé pour acheter un sandwich à un marchand de rue à peu près fiable. Ensuite il a voulu me montrer sa maison. Les jeunes à droite sont ses frères. Une anecdote pour illustrer la saleté incroyable de ce bled. J'avais à la main le sac en plastique qui contenait les restes de mon sandwich que je ne voulais pas finir. J'attendais de trouver une poubelle pour m'en débarrasser. Un des frères me l'a pris des mains et l'a tout simplement balancé dans la rue devant chez lui.

La maison, où plutôt les deux pièces que j'ai vues, je ne vais pas m'amuser à les décrire, mais sachez que c'est encore pire que ce que vous pouvez imaginer.

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Ce type a voulu m'offrir un thé dans son café préféré, café que je ne pourrai certainement pas retrouver, même avec un plan. Il m'a demandé si je voulais fumer du Haschich avec l'instrument que vous voyez là et qu'ils appellent un Bong. J'ai poliment refusé. Il ne faut tout de même pas se mettre dans des situations inextricables, d'autant plus que c'est un militaire qui me le proposait.

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Mon militaire est en train de se défoncer.

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Scène de rue

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Heureusement, il y a un grand nombre de chèvres. Aussi incroyable que cela puisse paraître, elles mangent absolument tout ce qu'elles trouvent : le papier, le carton, le plastique et les détritus. Sans les chèvres, je n'ose imaginer dans quel état seraient les rues.

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Scènes de rue

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Les moutons aussi bouffent de tout.

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Scènes de rue

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Le quai des pêcheurs

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Je n'ai jamais vu des gens aussi heureux de se faire prendre en photo.

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Même la Fatma a voulu être de la fête, ce qui m'a tout de même surpris.

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Scène de rue

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Atelier de mécanique. Je ne me serais pas permis d'entrer faire une photo s'ils ne me l'avaient pas demandé.

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Scènes de rue

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Sur le soir, j'attendais que mon minibus se remplisse pour partir quand ces trois jeunes ont absolument voulu poser. Si ça peut vous faire plaisir, une petite dernière.

 

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1 janvier 2012 7 01 /01 /janvier /2012 06:42

Je ne l’aurai jamais cru, mais, sauf si j’ai de longues distances à faire, je ne porte plus que des Tongs. Auparavant, je n’avais jamais pu les supporter. Cela me faisait mal et je ne savais pas comment marcher avec ça aux pieds, mais, petit à petit, j’ai commencé à me rendre compte que, dans les pays chauds, c’était super pratique et je m’y suis habitué. D’autant plus qu’en Egypte, il faut poser ses chaussures pour entrer sur les terrasses. C’est de la faute, ou bien, c’est grâce à Sang Song que j’en suis arrivé là, car je ne l’ai jamais vu avec autre chose aux pieds, même pour porter son sac à dos de 23 kilos. J’en avais une paire, bien sur, pour la chambre et les salles de bains douteuses, mais il ne me serait jamais venu à l’idée de les porter à l’extérieur. Comme quoi…

Au fil de mes rencontres, je me suis rendu compte que la Tong était universelle, mais était désigné par un nom différent suivant le pays.

Dans le bus il y a quelques jours, j’ai discuté avec un Québécois qui en portait, il les appelait des Gougounes.

Pour les Belges qui m’accompagnaient pour traverser le désert c’étaient des Slaches.

Pour Sang Song, le Sud Coréen, c’étaient des Sleepers, même si Asami, la Japonaise, m’a affirmé qu’au Japon les Sleepers étaient des chaussures d’intérieur fermées. En réalité, au Japon, les Tongs sont délicieusement appelées Flip Flop.

J’ai fait un tour sur Internet et j’y ai vu que la Tong n'était pas du tout d'origine Asiatique, comme je le croyais. Elle est vieille de plus de 3500 ans, on en retrouve les premières traces en Egypte, et Tong vient de l'anglais thong (lanière) non donné par les soldats américains aux chaussures que portaient les Vietnamiens dans les rizières.

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Tong en papyrus

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29 décembre 2011 4 29 /12 /décembre /2011 16:46

 

Mardi 27 décembre 

 

Je suis sorti au levé du soleil, comme tous les matins, et je me suis trouvé nez à nez avec un groupe de chameaux. Sans doute attirés par la verdure, ils s’étaient introduits dans le Camp et broutaient allègrement les feuilles des arbustes. Le veilleur de nuit ne s’était aperçu de rien. S’il ne pouvait pas voir sept ou huit chameaux se balader dans le Camp, on pouvait émettre des doutes quant à sa réelle utilité. J’ai pris quelques photos, puis je suis allé le sortir de ses rêves pour lui dire qu’il avait intérêt à les faire déguerpir avant qu’ils aient tout bouffé, sinon ça allait mal se passer pour lui.

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Nous avons eu une longue conversation métaphysique avec Sylvia. Elle a trouvé une oreille attentive et s’est laissée aller. Elle a essayé de m’expliquer ce qu’elle avait ressenti pendant ces trois jours et ça frisait l’expérience mystique. Au petit-déjeuner, il faut s’accrocher, surtout en Anglais. En parlant de ça, j’ai dû faire quelques progrès, car chaque fois que je cherche un mot et que je m’excuse pour mon Anglais défaillant, on me dit «  your English is perfect ». C’est exagéré, mais ça fait toujours plaisir.

Vers dix heures, alors que nous traînions toujours sur les coussins de la terrasse, elle m’a demandé si je voulais faire une balade sur la plage. Je suis parti comme j’étais, sans argent, sans mon appareil photo, en Tong et nous ne sommes revenus qu’en milieu d’après-midi. Entre temps, nous avions rencontré un gars nommé Maged El Said, propriétaire du Camp Habiba, plus haut sur la plage, mais aussi d’une ferme de production de légumes biologique. Ce type st un curieux personnage. Il a fait des études de langues au Caire et parle un peu Français. Une des premières choses qu’il m’a dites, c’est qu’il avait été à la plage naturiste du Cap d’Agde. Son ambition, c’est d’apprendre aux Bédouins la culture biologique, et de transformer les terrains incultes qui bordent la côte jusqu’à Nuweiba en un immense jardin. À la tienne mon pote, je lui ai dit, m’est avis que c’est pas gagné ! Ça l’a bien fait marrer. Du coup, il nous a emmené en 4x4 visiter sa ferme qui se trouve être plutôt un grand jardin. Les légumes sont plantés dans le sable et sont entretenus avec un mélange biologique assez curieux et dont les principaux ingrédients sont des petits quartiers d’orange, de l’oignon et de l’ail. Il se fournit en orange auprès des cafés et des restaurants qui préparent des jus de fruits. Ne travaillent dans ce jardin que des bénévoles qui se trouvent être des jeunes voyageurs. Il y avait un couple de Polonais, un Hollandais, une Chinoise et un Anglais. Tous voyagent presque sans argent. Ils s’arrêtent pour quelque temps dans des endroits comme celui-ci où ils sont logés et nourris et puis reprennent leur route. Ces jeunes avaient un point commun, c’est qu’ils descendaient tous vers l’Afrique Noire. À midi, nous avons été invités à manger des légumes justes cuits sur la braise avec du pain. Nous étions accroupis autour d’une table basse, sous une tonnelle de palme et chacun a raconté ses expériences de voyage.

L’Anglais voyage en vélo, les autres en stop. Le Hollandais a réussi à prendre un bateau gratuitement en Turquie pour venir en Egypte. Il se nourrit en récupérant les denrées périmées, celles dont les emballages sont abîmées et invendables. Il dit avoir souvent trop à manger et dépense en moyenne 150 Euros par mois. Ce qui pourrait prendre place dans le livre des records même s’il affirme qu’il est possible de faire avec moins d’argent. Cette façon de voyager demande du courage et un sens aiguisé du système D. Chacun admet que c’est parfois difficile, mais tous paraissent heureux et il émane d’eux une grande joie de vivre. Ils n’ont qu’un seul projet, continuer le plus longtemps possible et je peux comprendre ça, vu que après seulement deux mois de cette vie, il m’est difficile d’imaginer reprendre une existence normale.

De temps à autre, j’observais Sylvia du coin de l’œil. Tout cela semblait la faire réfléchir furieusement. J’imaginais sans peine ce qu’elle était en train de se dire. En trois mots : pourquoi pas moi.

Le temps est revenu au beau. Il n’y a plus un souffle d’air et il fait carrément chaud.  Nous avons pu à nouveau manger sur la terrasse ce soir. J’ai bu une bonne bière en dégustant mon plat de pâtes aux calamars. À la fin du repas, j’ai regardé Sylvia ouvrir son étui à cigarettes avec les gestes délicats qui là caractérisent, et je me suis dit que mon moral était sur une bonne pente.

 

 

 

Mercredi 28 décembre 

Comme j’ai une bien meilleure connexion et qu’il ne s’est rien passé de particulier aujourd’hui, voici quelques vues du Camp que j’avais en réserve.

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Et pour finir, le Café Internet d'où je vous envoie tout ceci.

 

 

Jeudi 29 décembre

 

 

Sur le coup de deux heures du matin, j’ai entendu Goofy pleurer devant la porte de ma hutte – Goofy, c’est le nom du chiot. Ce pauvre petit chien se sent abandonné. Les gens s’imaginent qu’il suffit d’adopter pour faire une bonne action, mais les petits de tous les animaux, domestiques ou sauvages, ont une mère qui veille sur eux pendant plusieurs mois. Lui, il est perdu ici, sans mère, sans maître, sans personne pour s’occuper de lui. En ce moment, j’attends l’heure de mon bus et il s’est endormi dans mes bras. Peut-être n’aurai-je pas dû l’habituer à moi. Je ne sais pas, mais au moins il aura eu un peu d’affection pendant quelques jours. Cette nuit, je lui ai ouvert ma porte. Il était tellement content qu’il a fait un petit pipi sur le carrelage. Je l’ai posé sur le lit, à mon côté, et il a dormi comme un bien heureux jusqu’à neuf heures du matin. Il n’est pas bien épais. Lorsque je le caresse, je peux sentir ses côtes. J’en ai touché un mot à Sylvia ce matin. Elle est au Camp depuis six semaines et pourra expliquer aux propriétaires que ce chien à besoin d’attentions, de quelqu’un à qui se raccrocher.

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Autoportrait


La façade lointaine, sophistiquée de Sylvia s’est un peu effritée tout à l’heure, au moment de se dire au revoir. Elle m’a attirée à elle et m’a donné trois bises ainsi qu’une longue accolade. Puis elle a glissé un papier dans ma main avec son e-mail. Tu pars trop vite, m’a-t-elle dit, pour une fois que j’avais quelqu’un à qui parler. Tout cela est un peu déstabilisant, mais je dois me faire violence. Je dois bouger. Sinon, chaque jour qui passe rends les choses plus difficiles. J’ai envie de voir un peu de monde pour le jour de l’an. Je suis donc revenu à Dahab pour quelques jours, ensuite j’irai à Sainte Catherine. Je n’ai pas encore fait une croix sur la Jordanie. Tout dépendra de la façon dont avancera le travail qui va arriver le 2 janvier et qui nécessite que je sois dans un endroit confortable.

J’ai eu le fin mot en ce qui concerne le village de Tarabin maintenant désertée par les touristes Israéliens. Il se trouve que, voici une dizaine d’année, il y a eu des attentats dans cette région du Sinaï. Auparavant, c’était un lieu de villégiature très prisé des populations frontalières parce que les prix y étaient très inférieurs à ceux d’Israël et que c’était vraiment la porte à côté. Depuis, le gouvernement a eu beau sécuriser la zone sud du Sinaï, les touristes ne sont pas revenus. C’est l’explication à tous les check points de l’armée qui se trouvent sur les routes. Car il y a effectivement une zone chaude, disons, au-dessus d’une ligne imaginaire Suez-Taba. On trouve, dans cette zone, les tunnels pour Gaza, les rebellions de Bédouins, les camps d’entraînements illégaux, les champs de pavot et de haschish et, de temps à autre, il y a un pipeline qui saute. Cela veut dire que les étrangers ne sont pas la bienvenue, car la population n’a pas envie d’étaler ses petites combines, et l’armée encore moins envie de montrer que, dans les faits, elle ne contrôle rien du tout.

Tous les ans, les pauvres gens qui vivent du tourisme ont espoir que les affaires vont repartir. Ils reviendront l’année prochaine, disent-ils, mais cet espoir s’amenuise avec le temps, car tout se dégrade très vite et il n’y a pas d’argent pour réparer. Mon opinion est que c’est foutu pour un bout de temps. Qui voudrait venir passer ses vacances dans ce village qui ressemble déjà à un vestige du passé.

 

 

 

Vendredi 30 décembre 

Lorsque j’ai fait un tour sur mon balcon, au réveil, je me suis aperçu que le ciel était nuageux. Je n’ai pas vu le soleil de la journée pour la première fois depuis que je suis en Egypte. J’ai questionné le réceptionniste. Il s’avère que la dernière pluie date d’il y a un an, presque jour pour jour. Cependant, la température reste douce. Dans ma chambre, je suis en tee shirt et je passe une veste pour sortir. Mais simplement parce que je suis frileux. Dans la rue, je croise beaucoup de gens qui se promènent bras nus. Il semblerait qu’il y a un peu plus de monde que lors de mon dernier passage, même si cela n’est pas évident à mon hôtel puisque je n’ai vu que deux autres personnes pour l’instant. Une asiatique grande et maigre qui passe son temps sur son ordinateur et un gars qui me semble venir d’Europe du Nord. Je n’ai pas pris contact pour l’instant. Je ne les sens pas bien, ces deux.

Je n’ai toujours pas compris comment fonctionnaient les banques. Elles étaient fermées aujourd’hui et ouvrent demain, in chā' Allāh ! Il y a intérêt, parce qu’il me reste deux jours d’autonomie. Je pourrais, bien sur, utiliser ma carte, mais je préfère changer mes Euros, avec l’avantage d’un meilleur change et puis, je m’en voudrais d’engraisser la banque avec la commission de retrait.

Ici, comme les restaurants à touristes sont éclairés toute l’année comme des sapins de Noël, rien ne semble avoir changé pour les fêtes. Je ne crois pas qu’il y ait une communauté Copte ou alors elle est bien discrète. De toute façon, les Coptes ne fêtent pas Noël avec le calendrier Grégorien, mais le 7 janvier. Les musulmans, eux, bien que le prophète ait dit : « tu te réjouiras avec ton voisin s’il est en fête », n’en ont rien à cirer. J’ai cherché comme une andouille des chocolats dans le supermarché du coin, mais oualou, il n’y a que des copies de chocolat de marques Suisses mais parfaitement immangeable. Croyez-moi, j’ai essayé. À la place, j’ai acheté un chocolat glacé, j’ai enlevé le papier, et comme je le portais à ma bouche, il s’est détaché du bâton pour tomber entre mes tongs. Je suis resté comme un con avec mon bâton où restait accroché un peu de crème. Ce truc devait être conservé à une température au-dessus de zéro, sinon, je ne vois pas… Après tout, il a peut-être mieux valu que ne le mange pas.

Au restaurant, ce soir, je me suis installé sur une terrasse composée de plusieurs petits coins de dix mètres carré environ. À l’intérieur de ces espaces intimes, trois tables basses et des coussins étaient disposés de façon à ce que les convives soient face à face. Ce qui fait que j’ai pu observer tout à loisir les deux couples qui dînaient avec moi. J’étais seul, mais je ne les enviais pas. Un des couples jouait aux cartes en attendant que les commandes arrivent. Je crois que c’est la première fois que je vois des gens jouer aux cartes au restaurant. Ils jouaient sans passion, sans paroles, sans un sourire, comme s’il leur était devenu insupportable de se regarder. Ces cartes me sont apparues comme le faux-semblant ultime avant la désagrégation de leur couple. À côté, ils n’avaient rien à leur envier. La femme lisait un livre et le type fumait cigarette sur cigarette. Ces deux ne se parlaient pas non plus. En temps normal, j’aurais probablement engagé la conversation, mais j’ai eu le sentiment que si je le faisais, ils allaient à coup sûr me déprimer.  J’ai préféré rentrer pour regarder une vidéo.

 

 

 

Dimanche 1er janvier 

Il y a une chose que j’ai remarquée, c’est que le premier contact avec les personnes que je rencontre vient, neuf fois sur dix de mon initiative. Je me demande si c’est de la timidité, si les gens se suffisent à eux-mêmes ou bien simplement parce qu’ils ne savent pas comment m’aborder. Il est vrai que je suis un adulte bien mûr et que l’immense majorité des voyageurs sont relativement jeunes. Mais ces deux Japonais ont dépassé la trentaine, ils voyagent depuis un ans et il y a probablement chez eux moins de crainte à aborder un inconnu. Voilà peut-être pourquoi, alors que, hier matin, je terminai mon petit-déjeuner et que je pianotais sur mon portable, cette grande fille s’est plantée devant moi. « Bonjour, comment allez-vous ? Vous avez remarqué, nous avons le même laptop. » Je l’avais remarqué, effectivement. Hier soir, vers six heures, je l’avais vu attablée  avec ce qui devait être son compagnon où son mari, et je m’étais demandé pourquoi diable ils avaient besoin de voyager avec deux ordinateurs identiques.

Elle s’appelle Miyuki et lui, Hirotaka. Il doit mesurer 1,85 m. Il fallait bien ça pour ne pas sembler ridicule à côté de sa femme. Finalement cette fille que je ne sentais pas s’est avéré être un bout en train de première. Elle porte en permanence un bonnet de laine Péruvien et des vêtements plus chauds que nécessaire. Son mari, que j’ai vu pour la première fois hier soir, se marre tout le temps. Il est le genre de public idéal pour sa femme. Son métier, c’est Web Designer, ce qui a joué grandement dans leur décision de partir pour un grand voyage. Miyuki travaillait pour une entreprise d’import-export. Ils ont bossé plus de dix ans avant de se dire qu’il ne fallait pas attendre d’être vieux pour voir le monde. Il est assez rare au Japon de voir des gens installés quitter leur boulot pour partir voyager. Au départ, ils pensaient à six mois. Aujourd’hui, ils en sont à un an et repartent pour une année supplémentaire tout en se demandant si cela sera suffisant à apaiser leur appétit. Lorsqu’ils seront à court d’argent, ils savent que Hirotaka pourra exercer son métier de n’importe quel coin du globe. Ce jeune couple à un état d’esprit que je n’ai aucun mal à comprendre. Ce qui est plus dur à comprendre pour moi, c’est pourquoi n’y a-t-il pas plus de gens attiré par ce genre de vie. Mais là, je sens que je commence à vous emmerder…

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Miyuki et Hirotaka


Et donc, puisque le courant passait, il n’y avait aucune raison de ne pas organiser notre soirée de premier de l’an ensemble. Rien de particulièrement festif, vu que l’ambiance ici n’a rien à voir avec celle d’Ibiza. Pas de petit cul en minijupe, pas de décolletés à paillettes, pas de bouchons de Champagne qui pète. À la place, quelques lourdauds Allemands riant grassement et que je m’attendais à entendre roter à tout instant, une poignée de vamps sur le retour, quelques jeunes Egyptiens dont la technique de drague vous laisse pantois et plein de commisération pour les victimes, deux trois cocktails, une bière, quelques pétards et feu de Bengale et surtout, pour sauver la soirée, les plaisanteries à répétitions de Miyuki qui avec un verre dans le nez se pose là pour la déconne. Grâce à elle, nous avons passé une excellente soirée, ce qui, au départ n’était pas gagné.

 

 

 

Lundi 2 janvier

 

Mes deux camarades de fêtes ont pris le bus à 16 heures pour Louxor. Ils vont faire en sens inverse la route qui m’a amené à Dahab. Dans leurs bagages, ils ont emporté tous les renseignements qu’il m’a semblé utile de leur donner. En échange, j’ai eu droit à une carte de visite. Viens nous voir si tu passes par le Japon, mais pas avant un ans, m’a dit Miyuki en rigolant. Ils ont l’intention de descendre ensuite vers l’Afrique de l’Est en commençant par l’Ethiopie. Cela me tenterait aussi, mais on ne peut pas être partout à la fois.

J’ai envie maintenant de continuer ma route, mais je suis obligé d’attendre des documents car il n’y a pas de Wifi à Sainte Catherine. C’est embêtant. Une fois que j’aurai reçu ces documents, je pourrai partir, car le travail me prendra quelques jours pendant lesquels je n’aurai pas vraiment besoin de connexion.

Non loin de mon hôtel, il y a une superette où j’achète des fruits de temps à autre. Je n’y ai jamais vu aucun client Egyptiens. Cela veut dire que les prix doivent êtres scandaleusement élevés. Cependant, le village Bédouin est à vingt minutes de marche. Pour quelques bananes, c’est un peu loin. Dans cette superette, je vois essentiellement des jeunes fauchés - c’est un paradoxe – qui doivent penser que les restos sont trop cher pour eux. Il y a deux où trois Camps basiques à Dahab où les clients peuvent préparer leur bouffe dans une cuisine mise à leur disposition. Mon opinion est que ce sont des économies de bout de chandelle quand on sait qu’il est possible de manger pour deux Euros et même moins. Où alors, ils en ont marre de la bouffe Egyptienne dont il est vrai qu’on a à vite fait le tour, du moins dans les restaurants. En ce qui me concerne, j’ai jeté mon dévolu sur quelques spécialités que je commande à tours de rôle, mais je commence à saturer. Le problème, ce sont les légumes et les crudités. On vous sert systématiquement une petite assiette de salade composée avec le plat que vous avez commandé, mais il est rare que je la touche car elle est en général défraîchie. Et puis, ils ne savent pas cuire les légumes. C’est pour cette raison que je vais régulièrement au restaurant Thaïlandais et que j’essaye de manger des pâtes quand j’ai repéré un endroit où elles sont convenables. Une autre surprise, c’est que les fruits ne sont pas très bons. Ils sont souvent secs, peu sucrés et sans saveur, mais je fais tout de même en sorte d’en manger tous les jours. La santé avant tout. À ce propos, j’ai commencé à pratiquer une gym matinale. Étirements, abdos, pompes et tractions en me tenant au cadre de l’appareil à air conditionné qui se trouve sur le balcon. Les gens dans la rue doivent penser que je suis cinglé, ce que, parfois, je ne suis pas loin de croire moi-même.

 

 

 

Jeudi 5 janvier

J’ai fini par recevoir les documents attendus ce matin. Je partirai donc demain de bonne heure. En ce moment, la nuit tombe vers 17h30, cela me laisse donc cinq ou six heures de travail le soir et la possibilité de profiter de mes journées.

J’ai reçu plein de mails gentils dont certains, comme celui de Asami, très émouvants. Elle se trouve à Naples, ce qui me laisse dans une certaine confusion vu qu’elle devrait être au Maroc. Elle demande entre les lignes à quel moment je serai en France. J’imagine que cette info ne va pas du tout aider à ma concentration.

Pour revenir à du plus léger, vous êtes vous déjà fais épiler les oreilles avec du fil dentaire ? Parce que moi, oui ! Après un mois de tergiversation, de repérages, de passages l’air de rien devant les devantures de coiffeurs, j’ai fini par me décider et je suis entré dans la première échoppe que j’ai trouvée. Un mélange de défi et de pur hasard étant donné que ce coiffeur se trouve juste à côté de la cantine où j’ai l’habitude de manger à midi.

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Ma petite cantine du midi. Le pain directement du producteur au consomateur.

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Après, vous irez dire que je ne suis pas courageux !

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Je suis un peu crispé, non ?


Coiffeur, il l’était certainement car j’ai lu son diplôme encadré et fixé au mur, mais acrobate du fil dentaire ce n’était indiqué nulle part. Ainsi, après ma coupe, ce type m’a demandé si je voulais qu’il m’enlève les quelques poils qui poussent dans mes oreilles. Habituellement, je suis assez grand pour le faire moi-même, mais pourquoi pas. Je m’attendais à ce qu’il utilise un rasoir, mais c’est donc avec un fil qu’il m’a épilé les feuilles. Comment il s’y est pris ? De ce que j’en ai compris, il m’a semblé qu’il emprisonnait le poil dans une boucle et tirait d’un coup sec. Vous me pardonnerez cette explication vaseuse, mais c’était difficile à voir étant donné la vitesse de croisière de deux poils seconde. Comme quoi, on peut trouver des artistes dans les endroits les plus inattendus.

Deux petites choses encore.

Ici, lorsque vous achetez un truc à la superette, on ne vous rend pas la petite monnaie. À la place, vous avez droit à des Chiclets.

Et puis, je vous laisse méditer ceci : pourquoi n’ai-je jamais pensé à mettre mes lunettes de natation pour éplucher les oignons ?

 

 

Vendredi 6 janvier 

 

J’ai beau savoir que je ne dois me fier à personne, surtout concernant des informations de seconde main, je me suis fait encore avoir. Je me suis pointé ce matin à 7h30 à la station où se trouvait le minibus, mais j’ai vite compris qu’il ne partirait pas. J’avais beau regarder dans toutes les directions, personne ne semblait s’avancer avec un sac ou des bagages. Je savais que le monastère était fermé le Vendredi, mais mon informateur m’avait affirmé que des gens se rendaient tous les jours au village, or, cela était apparemment faux. J’étais tout seul et, comme les minibus ne partent que s’il y a un nombre suffisant de voyageurs, j’étais baisé.

Il ne restait plus que le taxi, mais il allait falloir jouer serré pour le prix. Connaissant les loustics, j’ai remis mon sac sur le dos et fait semblant de foutre le camp sans demander quoi que ce soi. Je n’avais pas fait cinq mètres que :

- Hey, mister, taxi ? 

J’ai continué à marcher

- 250 Livres, good price !

- Je ne peux pas me permettre ça, j’ai dit sans m’arrêter.

- Donnes-moi ton prix ?

- J’ai souri dans ma barbe, sans m’arrêter de marcher : 100 Livres, pas une de plus, j’ai dit fermement.

- Tu es Français, non ? Sous-entendu, tu es plein de blé.

- Je n’ai pas mis les pieds en France depuis longtemps, je ne suis pas un touriste, juste un voyageur fauché.

- OK, 150, mais tu as de la chance. Je vais voir ma famille à Suez et c’est sur ma route.

Je n’en ai pas cru un mot. S’il devait aller à Suez, Il serait passé par la route côtière et non par l’intérieur du Sinaï

- Si c’est ta route, je te donne 100 Livres et c’est tout bénef pour toi.

- Bon, 120, donnes moi 120 et tu y es dans deux heures.

J’ai fait un rapide calcul. Cela faisait 70 Livres de plus que le minibus, mais d’un autre côté, en couchant ce soir à Sainte Catherine, j’allais économiser sur mon budget Hôtel. La différence était trop minime pour ne pas sauter sur l’occasion.

La voiture était confortable : une Kia en bon état. J’ai pu profiter du paysage bien mieux que dans un bus. L’armé a contrôlé mon passeport deux fois à des check points un peu flipants puisque nous étions tenus en joue par de grosses mitrailleuses. Le chauffeur pensait que la sécurité était importante et n’avait pas de problèmes avec ça, ben moi non plus, alors.

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Les Monts Sinaï sont en vue

Comme promis, j’étais à dix heures au village, mais trop tard pour envisager quoi que ce soit. Je me suis installé au Bédouin Camp où je me suis renseigné pour trouver un guide obligatoire pour l’ascension du Mont Moïse. Il fait trop froid la nuit en ce moment pour le lever du soleil. De toute façon, je ne vois pas pourquoi le coucher du soleil serait moins impressionnant. De plus, je préfère monter de jour pour voir le paysage. À mon humble avis, cette histoire de lever de soleil et une invention des Tours Operators de Dahab pour faire plus de fric.  Pour le guide, on m’a dit que j’en trouverai un sur place. Apparemment, le tarif est le même que l’on soit seul ou dix à monter : 110 Livres. Il va falloir que je me trouve des compagnons de grimpette. Le problème, c’est que ça ne se bouscule pas au Camp.

J’ai fait un tour dans le village, sans rien voir qui ressemble à un candidat à l’effort.

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Le village de Sainte Catherine, 2 300 habitants

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J’ai donc décidé de rentrer et de travailler tranquillement dans ma chambre. Je verrais bien demain.

Un mot tout de même sur la température un peu frisquette qui est de l’ordre de 7° au soleil. Par chance, pour la première fois que je suis en Egypte, je dispose d’un chauffage dans la chambre. Il fonctionne très bien.

Le Camp Bédouin sert les repas dans un petit restaurant. Petit, ce n’est rien de le dire. Trois tables en tout séparées de la cuisine par un comptoir. Cela fait très refuge de haute montagne. Évidemment, il y a la possibilité de manger dehors, mais là, faut être un peu maso.

Dans la cuisine, trois types sympathiques préparent la bouffe à la demande. Cela ne peut pas être plus frais. Bien sûr, c’est un peu long, mais le spectacle est en prime.

Deux autres voyageurs ont mangé avec moi. Une Chinoise qui n’a pas levé les yeux de son guide touristique et un Anglais barbus qui notait un tas de truc sur un petit carnet. Pour la conversation, ce n’était pas top. Parfois j’ai du mal à comprendre les gens. Qu’est ce qui est important dans ce cas-là ? C’est de faire connaissance, non, ou je me goure ?

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Le Camp Bédouin

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Samedi 7 janvier 

 

Egypte itinéraire9

 

En me levant, j’ai regardé le ciel. Pas un nuage, pas un souffle de vent, c’était parfait pour une belle balade. J’ai travaillé jusqu’à 9 heures en buvant beaucoup pour m’hydrater. Ensuite, j’ai pris un petit-déjeuner copieux, puis je suis allé acheter des barres chocolatées et des biscuits. J’ai mis ça dans mon sac avec une grande bouteille d’eau, un pull supplémentaire, ma veste et une lampe électrique. Sur moi, je n’ai gardé qu’un tee shirt technique à manche longue et ma polaire. J’ai mis mes chaussures de marche et je suis parti.

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Le village de Sainte Catherine est au fond, dans la cuvette.


Le monastère, départ de la montée vers le Mont Moïse, se trouve à trois kilomètres du village, au bout d’une étroite vallée. Cela m’a fait un petit échauffement.

Je n’apprendrai à personne que le Mont Moïse est une montagne sacrée. Elle est, pour les croyants, le lieu où Moïse reçu les Tables de la Loi. La minuscule chapelle érigée sur son sommet culmine à 2260 mètres. Ce qui en fait le deuxième sommet du Sinaï, à peine battu par la Montagne Sainte Catherine qui lui fait face, et ainsi appelée parce qu’elle y fut emportée par les anges après son martyr en Alexandrie.

Sur le parvis du monastère attendent les guides. Vous pensez bien qu’ils m’ont repéré de loin. Bien évidemment, ils ont essayé de me convaincre de partir tout de suite, mais il était encore tôt et j’avais le temps d’attendre d’éventuels candidats qui pourraient en partager le prix. Toutefois, je savais que le chemin n’était pas si difficile à suivre, aussi suis-je allé voir s’il ne me serait pas possible de me faufiler. Vous me connaissez, je n’aime pas trop ce qui est organisé et franchement, ça me pompait un peu de me faire guider sur un chemin où j’aurai pu parfaitement me débrouiller tout seul. Seulement, l’armée veille ! Interdit mon gars !

J’ai donc un peu rongé mon frein en faisant comme sœur Anne. Je me suis dit, ok, une demi-heure et tu y vas. Et, juste comme je prenais mon sac, une voiture est arrivée avec deux occupants. Un jeune couple dont la nana ressemblait furieusement à une belle fille Russe. J’en aurais mis ma main à couper. On s’est rapidement mis d’accord tous les trois. Nous ferions la montée par le chemin le plus long et redescendrions par les 3000 marches qui mènent directement du sommet au Monastère.

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Départ


Au début, le chemin était assez facile et nous avons pu parler. Ils étaient Russes, évidemment, habitaient Moscou bien qu’originaire d’une autre ville. Mais, comme il était architecte spécialisé dans le dessin de buildings, le boulot se trouvait à Moscou. Mes premiers Russes étaient adorables et intéressants. Ils m’ont appris au passage qu’il y avait une sorte de révolution qui couvait pour foutre Poutine dehors, car il voulait se représenter pour six ans et les Russes n’en voulaient pas. Il va truquer les élections m’ont-ils dit et ça va mal se passer. Je leur ai dit que je n’en avais pas entendu parler mais que j’avais des excuses car je ne suivais pas l’actualité, mais ils m’ont affirmé que Poutine s’efforçait de filtrer les infos. D’après eux, des vidéos sur des incidents commençaient à circuler sur Internet. Quelqu’un est-il au courant de ça ?

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Le chemin a commencé à se faire plus pentu. De loin en loin, nous passions devant une sorte de cabane où un Bédouin proposait du thé. Nous avons fait deux où trois haltes pour reprendre notre souffle car je trouvais que la vitesse de montée était assez rapide. Ces deux gamins tenaient la forme ou j’étais un peu rouillé.

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Avant, remarquez la cellule sur le pic.

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Après


De temps à autre, notre guide nous montrait une cellule isolée à flanc de montagne où les moines montent pour se recueillir. Ces cellules sont construites avec le granit du Sinaï et sont presque invisibles de loin. Un seul moine vit toute l’année dans une de ces cellules et ne redescend que pour les grandes fêtes religieuses.

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La cellule du moine solitaire. Il faut de bon yeux pour la voir.

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Nous avons grimpé des lacets de plus en plus pentus jusqu’au moment où nous sommes arrivé aux pieds des 750 marches qui assurent la partie finale de l’ascension. Ces marches sont faites de gros blocs inégaux et relativement hauts. Inutile de vous dire que l’effort est intense. Nous étions lessivés en arrivant au sommet et, à l’heure où j’écris, j’ai des courbatures aux cuisses comme si je venais de grimper le Mont Ventoux à vélo sans entraînement.

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1h 40 pour faire la grimpette alors que mon guide parle de trois heures. Je me disais bien que ça allait vite.

Au sommet, il ne faisait pas si froid que ça, mais j’ai tout de même enfilé ma veste parce que j’étais trempé. La vue était magnifique. On pouvait voir la côte, le golfe d’Aqaba et même les montagnes d’Arabie. Il y avait là un petit groupe de militaires qui faisaient des photos débiles, et deux filles qui avaient dû partir le matin. Sinon, quelques Bédouins qui vendaient des souvenirs : essentiellement des pierres et des cristaux trouvés sur la montagne. Ces Bédouins vivent dans de minuscules cabanes pendant 20 jours avant d’êtres remplacés.Je ne voudrais pas être à leur place car, la nuit, les températures sont négatives. Nous avons bu un thé tout en contemplant le paysage. Et puis il a bien fallu songer à redescendre.

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Du sommet

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La Chapelle

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Autre cellule de moine, vous la voyez, au centre à gauche ?

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Les Bédouins qui vivent au sommet

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Le jardin d'Isaï sur le chemin du retour.

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Jolie couple, non ?

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Départ des 3000 marches pour la descente

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Porte du goulet qui mène au Monastère.

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Les 3000 marches ont été construites par les Moines

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Monastère en vue.

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Le chemin du retour était évidemment plus facile au niveau cardiaque, mais pour les cuisses et les articulations, c’était assez éprouvant. En arrivant en bas, j’avais les tendons externes des genoux qui grinçaient sérieusement.

Mes amis Russes retournaient à Dahab le soir même et ont gentiment proposé de me déposer à mon hôtel. Nous nous sommes dit au revoir comme de vieux amis alors que je ne me souviens même pas de leur nom. C’est la vie.

 

PS : contre toute attente, ils ont installé la wifi depuis peu au Camp Bédouin ! En plus, elle marche très bien. Donc, je peux poster beaucoup de photos.

 

 

Dimanche 8 janvier

 

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Sable givré !

Journée travail. Le Monastère était fermé encore aujourd’hui pour je ne sais quelle fête religieuse. En plus, il pèle comme ce n’est pas possible. Il y avait du givre sur le sable ce matin. Je ne suis pas vraiment équipé pour les grands froids. Je n’ai pas mis le nez dehors à part pour les repas. J’en ai profité pour faire des photos de mon restaurant privé puisque je suis seul aujourd’hui.

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Je travaille dans mon lit comme Alexandre le bienheureux. Sauf qu’à la place des saucissons, du jambon de montagne et du kil de rouge, j’ai tous mon fourbi sur la couverture : ordinateur, ipod, disque dur portable, casque, calculette, chargeur de batterie, guide, trousse de toilette, mouchoirs papier, vêtements, étui à lunettes, biscuits, fruits, câbles en tout genre, un vrai bordel… Mais comme le lit fait deux mètres de large, je suis à mon aise. Je ne sais pas où ils trouvent des matelas aussi grands. Le problème, c’est que vu la largeur du lit, les draps ne bordent pas sur les côtés. Il faudrait qu’ils pensent à les faire sur mesure.

Un seul truc marrant aujourd’hui. Quand le Muezzin s’est mis à chanter ce soir, très faux, encore une fois, un âne s’est mis à braire tout ce qu’il savait juste à côté de ma chambre. Il n’avait pas l’air d’apprécier du tout et à couvert pendant un moment les haut-parleurs.  Ça m’a bien fait marrer et je l’ai remercié muettement.

 

 

Lundi 9 janvier

Comme je sortais du Camp Bédouin pour me rendre au Monastère, je suis tombé, nez à nez, sur mon guide du Mont Moïse. Il descendait du village en tenant deux chameaux par une longe. Il se rendait aussi au Monastère et m’a proposé de m’y amener gratuitement. Je me suis dit que, parfois, il ne fallait pas refuser les opportunités du hasard. Je n’étais encore jamais monté sur un chameau, c’était l’occasion ou jamais.

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Allez, couché !

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Alors, tu montes !

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Traversée du village. On rattrape un chameau.

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La vallée qui mène au Monastère.

Trois kilomètres ont été suffisants pour que je m’aperçoive que  le dos d’un chameau n’était pas le confort cinq étoiles. Ce ne sont pas tellement les mouvements qui sont désagréables, mais la selle qui n’a rien à voir avec celles qui sont utilisées sur les chevaux. Il doit falloir un bon moment avant de s’y habituer. Le guide m’a montré la position Bédouine, en croisant une jambe, puis en la bloquant avec l’autre pied, mais, au bout d’un moment, les frottements sont douloureux. Et, puis, le pommeau arrière est tellement près du dos que ce dernier tape chaque fois que le chameau fait un mouvement un peu plus brusque. En arrivant au Monastère, je n’étais pas fâché de descendre. J’ai donné 20 Livres au guide pour sa gentillesse et j’ai avisé avec inquiétude l’enfilade de bus garés sur le parking. Ces bus viennent du Caire en tour organisé pour la journée. Ils ne restent sur place que peu de temps. Il allait donc falloir que j’attende qu’ils déguerpissent. Heureusement, en entrant dans le Monastère – gratuit, c’est à souligner- je me suis aperçu que les groupes n’étaient guidés que vers l’église, le musée des trésors, l’enceinte et le Buisson. Ils ignoraient tout le reste, probablement par manque de temps. C’est donc par là que j’ai commencé. 

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Jardin

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Jardin

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Ce qu’il faut savoir, c’est qu’il y a des parties autorisées et d’autres interdites au public. Des petits panneaux indiquent les endroits où ne pas aller, comme les habitations des moines, par exemple. Or, comme je me promenais dans le haut des jardins, j’ai avisé, dans une zone désertée des touristes, une porte qui donnait sur un tunnel. Il n’y avait aucune interdiction concernant ce passage, et je me suis demandé pourquoi personne ne l’empruntait. Peut-être n’avais-je pas vu un panneau placé un peu plus bas. J’ai un peu hésité car, si je suis le premier à ne pas respecter certaines règles débiles, je n’avais pas envie de troubler la tranquillité de ces moines. Mais, bon, la curiosité a été la plus forte et je me suis dit que je rebrousserais chemin si on me faisait une remarque.

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Cette porte m'intrigue un peu.

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J’ai suivi le tunnel avant d’arriver au pied d’un étroit escalier que j’ai grimpé. En haut de l’escalier se trouvait une petite alcôve décorée d’un magnifique icône et pourvue de deux entrées. Une qui donnait sur une grande cours et l’autre sur la partie haute du Monastère.

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Sainte Catherine veillant sur le Monastère

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La cours supérieure

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Porte de l'alcôve donnant sur la cours supérieure

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Le seul endroit au monde où flotte encore le drapeau marqué de l'aigle à deux têtes

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Le seul endroit en Egypte où les cloches sont autorisées à sonner

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Système de levage de l'ascenseur extérieur

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Ascenseur vue de l'intérieur

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Ascenseur vue de l'extérieur

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Passage d'accès aux habitations des 25 moines qui vivent au Monastère

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Le Buisson Ardent où Dieu parla à Moïse est encore là

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La plus vieille traduction de la Bible. IV ème siècle.

J’ai croisé un moine alors que j’observais le système de levage de l’ascenseur extérieur. Il s’est contenté de me faire un signe de tête bien que, à mon avis, je n’aurai pas dû me trouver là.

Après ma visite solitaire de la partie haute, je suis redescendu pour aller voir l’église, le Musée et le Buisson. C’était un peu plus tranquille et j’ai pu apprécier les chef-d’œuvres que renferme cette église byzantine vieille de 1 400 ans. En particulier une collection d’icônes unique au monde. Les photos sont interdites dans l’église, aussi vous n’en verrez rien. Pour le reste, je vais me contenter de commenter les quelques photos jointes. 

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Monastère, vue générale. Manquent les jardins à droite.

 

Voir suite nouvel article : fin du voyage Egypte 

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